Chaque 1er novembre, en la fête de tous les saints, l’Église honore la foule innombrable de ceux et celles qui ont été de vivants et lumineux témoins du Christ. Cette fête est donc aussi l’occasion de rappeler que tous les hommes sont appelés à la sainteté, par des chemins différents, parfois surprenants ou inattendus, mais tous accessibles.
Prédication du père Louis Groslambert pour la solennité de Tous les Saints
Les saints qui ont porté un message pour le monde entier ont leur jour de fête. Aujourd’hui, nous les fêtons encore, mais nous leur associons tous les autres saints. Bernanos écrivait que « notre Église est l’Église des saints ». Que serait l’Église, en effet, sans les « saints de la porte d’à côté », sans ces gens qui exercent des métiers de service, les boulangers, les soignants, les agents de la sécurité, les humanitaires… qui font tout avec amour pour leurs frères ? Que serait l’Église sans les saints de la porte d’à côté, les parents, les éducateurs, les philosophes qui ouvrent les portes de la connaissance et qui, par leur comportement, exposent des raisons de vivre, de croire et d’espérer … comme de vrais témoins du Christ ? Que serait l’Église sans les saints de la porte d’à côté, les amoureux, les passionnés, les artistes qui donnent à notre monde un supplément d’âme… exactement ce que Dieu veut ? Que serait l’Église sans les moines qui recherchent la présence de Dieu, et sans les personnes âgées et les malades qui, puisqu’elles n’ont plus le souci du paraître, ont l’image de Jésus ?
Les saints ne forment pas une élite ambitieuse. Ayant entendu les béatitudes, ils ne cherchent qu’à être humains à la manière de Jésus, et, ce faisant, ils donnent envie de le devenir. Il n’y a pas deux races de baptisés, les saints et les pas saints ; en effet, les saints sont des anciens pécheurs ; le recrutement des saints se fait parmi les pécheurs. Qu’est-ce qui provoque leur mutation ? C’est ce que l’Église met en œuvre à notre intention : la Parole de Dieu plus désirable qu’une masse d’or fin, et la célébration des sacrements dans lesquels le Christ donne son Esprit. Ce qui transforme les personnes c’est qu’elles s’approchent du Christ, l’Agneau de Dieu, et qu’elles blanchissent leur robe dans le sang de l’Agneau. La prise de conscience que le Juste est mort pour nous, cela nous bouleverse et nous transforme.
Autrement dit, avec la Parole et les sacrements, l’Église est une machine à faire des saints. L’Église, nous la trouvons parfois trop éloignée de la sainteté ; or, on ne peut que constater que des saints se lèvent dans ses rangs. Pendant que nous lui reprochons ceci ou cela, les cœurs droits lui font rendre son meilleur rendement. Heureux sommes-nous d’avoir dans notre entourage des artisans de paix, des gens pleins de miséricorde, des assoiffés de justice, des doux, des constructeurs de la fraternité. Ce sont des cadeaux de Dieu.
Frères et sœurs, l’Église qui génère les saints, c’est vous. C’est vous que Dieu a choisis pour que vous soyez saints et irréprochables sous son regard. Dieu se plait à choisir des gens dont le cœur s’émeut de la souffrance des gens : c’est votre cas ! Dieu se plait à choisir des personnes qui préfèrent la solidité de la douceur à la fragilité de la violence : c’est votre cas ! Dieu se plait à choisir des gens capables de pleurer, des gens qui ont un cœur de chair et non pas un cœur de pierre ; c’est votre cas ! Vous êtes donc habités par l’Esprit de Jésus, le seul saint qui n’a pas commencé par être pécheur.
Les béatitudes sont assorties d’une promesse : « le royaume des cieux est à eux, ils verront Dieu, ils seront consolés » etc… Comment comprendre que la consolation soit promise à des personnes qui pleurent ou sont persécutées et que la richesse du royaume soit promise à des personnes totalement pauvres ? L’apocalypse répond : ils viennent de la grande épreuve ; ils ont blanchi leur robe dans le sang de l’Agneau ». C’est que notre humanité salie par tous ses péchés a été visitée par celui qui lave de tous les péchés. Contemplons celui qui a versé son sang pour la multitude en rémission des péchés, et demandons-lui de nous laver toute l’humanité dans son sang, dans son amour total.