15 bis Rue du Docteur Eugène Jacquot, 90400 Danjoutin

21ème dimanche du temps ordinaire
27 août 2023

A chacun de nous, comme aux disciples, Jésus demande : « Pour toi, qui suis-je ? Que dis-tu de moi ? » Attention, Jésus ne demande pas « qui suis-je ? » Donc il ne faut pas répondre en citant GOOGLE. Si je dis, selon mon dictionnaire Larousse : « Jésus, tu es le fondateur du christianisme », je fais comprendre que ma relation avec Jésus est aussi distante et impersonnelle que ma relation avec Jules César ou Ramsès. Jésus demande : « qui suis-je pour toi ? » Ce qui signifie : « qu’est-ce qui est changé dans ta vie depuis que tu me connais ? Qu’est-ce qui est changé dans ta vie à cause de moi ? ». Même les mots du catéchisme ne suffisent pas à répondre, car si je dis « Jésus est fils de Dieu, Jésus est sauveur », je ne dis pas ce que ça apporte à mon espérance personnelle ou à ma vie en société. Je reviendrai bientôt sur les mots du catéchisme.

            Frères et sœurs, Jésus demande à chacun « qui suis-je pour toi ? comment ta vie est-elle colorée, charpentée, modifiée… par le fait que tu me connais ? Et une réponse impersonnelle est exclue. Il faut répondre en disant « je », en parlant de nous-mêmes.

            Que répondrais-je, moi ? Je peux répondre ceci : Jésus, je t’admire parce que tu es libre face aux pouvoirs des hommes, face aux règlements des hommes, face aux peurs des hommes, face au succès, face aux échecs… Par toi, j’apprends à être davantage libre face aux pressions, face aux rancunes, aux échecs. Je répondrais aussi : Jésus, tu es pour moi l’amour fidèle : je contemple ta croix et je vois que pour aimer à ce point, -aimer des hommes peu aimables – tu as une fidélité extraordinaire : du coup, je sais que ton amour me sera absolument fidèle et que je peux regarder l’avenir avec espérance. Je répondrais aussi : Tu es extraordinaire, car tu es le seul qui regarde chacun avec miséricorde ; c’est pourquoi ta manière d’être en relation est la seule manière de construire la paix, et la justice, etc… Moi, j’ai répondu en disant « je ». Et vous, frères et sœurs, que diriez-vous quand Jésus vous demande « pour vous, qui suis-je ? » (silence)

            Frères et sœurs, quand Jésus vos pose-t-il sa question ? A tout moment de la vie. Si des personnes tiennent des propos racistes, Jésus nous interroge : « il y a des racistes ; mais toi, me tiens-tu pour le frère universel ? » Si se présente une situation injuste, Jésus nous demande : « il y a de l’injustice ; mais toi, veux-tu être comme moi, assoiffé de justice ? » Des personnes sont-elles cataloguées, condamnées ? Jésus nous questionne : « ils sont sans miséricorde ; mais toi, veux-tu pratiquer ma miséricorde ? » Bref, chaque jour, le Christ nous dit « Par bien des aspects la société est inhumaine ; mais parce que tu me connais, me prends-tu pour celui sur qui on peut construire des relations saines et une société humaine ? ». Toute situation conduit à préciser qui est Jésus pour nous.

            Je reviens sur les mots du catéchisme. Ils sont précieux ; mais il faut les expliciter, les casser comme on casse une noisette pour accéder à l’intérieur. D’abord le catéchisme dit que Jésus est vrai homme, le vrai homme. Cela revient à dire qu’il a réussi sa vie d’homme, que son invitation à accueillir, à partager, à pardonner… fait grandir en humanité, qu’il me donne le goût de m’élever au-dessus des vaines idoles (la plus redoutable des idoles étant le « moi »), que le don qu’il a fait de lui est un sommet d’humanité… Bref, quand le catéchisme dit « Jésus est vrai homme », cette expression me fait comprendre qu’il est l’homme tel que je me sens appelé à être homme, l’homme qu’il serait urgent d’imiter en tournant le dos à tous les péchés qui dévalorisent la noblesse humaine.

            Le catéchisme dit aussi que Jésus est vrai Dieu. Cela revient à dire qu’il a manifesté l’amour sans limite … qu’il libère de tout ce qui emprisonne comme Dieu avait libéré d’Egypte, … et puis qu’il n’est pas un être du passé mais qu’il est vivant aujourd’hui, qu’étant vivant, il est actif et que son activité, c’est d’être créateur de vie comme Dieu le Père, de donner à chacun sa force de vie, sa résurrection, comme Dieu le Père. Saint Paul dit « tout est de lui, tout est pour lui, tout est en lui ». Tout est de lui, car s’il y a des hommes c’est parce que le Christ a voulu que la multitude bénéficie de l’amour du Père autant que lui ; « tout est pour lui », car il ouvre les bras pour tout rassembler dans son amour ; « tout est en lui » car il saisit l’humanité dans sa fidélité et son amour. Frères et sœurs, nous avons la chance d’être baptisés – plongés dans le Christ. Qui est-il pour nous ? Celui qui nous baigne de son amour. A lui la gloire pour les siècles.

20ème dimanche du temps ordinaire
20 août 2023

Les moyens de circulation ont accentué la mobilité des gens, le brassage des peuples, la rencontre d’autres cultures, d’autres religions. Parfois, ces rencontres se passent sous le signe de la bienveillance, mais pas toujours. Il nous est donné d’entendre comment le peuple juif s’est comporté quand il a rencontré d’autres peuples. Et j’ai entendu que, bien qu’étant sûrs d’être le peuple qui a le privilège d’avoir une Loi infiniment plus sage que les autres peuples, ils gardent précieusement les paroles qui contestent leur privilège et disent la vocation sainte des païens, ainsi vous avez entendu Isaïe : « les étrangers attachés au Seigneur, je les conduirai à ma montagne sainte, je les rendrai heureux » ; et l’enseignement de saint Paul : « Dieu veut faire miséricorde à tous ». Et voyez l’éloge que Jésus fait d’une païenne « Ta foi est grande ». Recueillons un premier enseignement : est sur la bonne voie la personne qui entend la voix qui critique ses réflexes. Cette voix contrariante, bienvenue, c’est la présence de Dieu en nous !

            Nous avons mis des masques et gardé des distances pour nous protéger d’une épidémie ; mais, l’épidémie étant finie, nous gardons encore des distances pour nous protéger de ceux qui ne sont pas comme nous, de ceux qui ne sont pas « de chez nous », pas de notre pays, pas de notre Eglise : c’est bien vrai : nous n’incluons pas facilement dans nos familles, dans notre village ou dans les groupes de paroisse celui qui est nouveau, qui a d’autres idées…, Les disciples disaient à propos de la femme « elle nous dérange, renvoie-la » ; nous disons comme eux « ils ne sont pas de chez nous ; ne nous mêlons pas à eux ». Recueillons ce 2ème enseignement : pour n’être pas prisonniers de nos peurs, de nos replis, de l’idolâtrie de nous-mêmes, accueillons comme une chance les déclarations de l’Eglise qui contrarient nos réflexes.

            Il y a un troisième message : C’est que Dieu donne ses bienfaits à tous, aux non-baptisés autant qu’aux baptisés, à ceux qui ont la peau bronzée autant qu’à ceux qui ont la peau blanche. Nous y croyons, c’est pourquoi nous sommes surpris que Jésus dise qu’il n’est venu que pour les juifs et qu’il n’a pas à sauver les non-juifs. Pourquoi St Matthieu a mis cette phrase sur les lèvres de Jésus ? Sans doute pour prendre en compte les pensées de ceux qui, dans sa communauté comme dans les nôtres, s’opposaient à l’idée qu’il y a du salut pour les non juifs, et qui s’opposaient au projet de leur annoncer l’évangile et de les baptiser. Quand st Matthieu fait dire à Jésus qu’il n’est venu que pour les juifs, il amène astucieusement la magnifique profession de foi de la femme païenne. Cette dame païenne à qui les juifs donnent le qualificatif injurieux de « chien », dit à Jésus qu’une miette de sa miséricorde suffira à sauver sa fille ; vraiment, elle a une foi bien supérieure à celle de tous les croyants. Je vous suggère de prendre quelques instants de silence pour faire la même profession de foi et pour dire au Christ : « Par bien des côtés, je suis un païen, mais une miette de ta miséricorde suffit à me sauver » (silence)

            Pensons aux non-chrétiens que nous connaissons. Regardons donc comme des gens attirés par Dieu, comme les mages païens… Pensons que Dieu veut les associer au même héritage que les juifs et les chrétiens, que Dieu les appelle à être sauvés tout comme nous, puisque Jésus a dit « allez, de toutes les nations faites des disciples ».

            Enfin 4ème : la païenne demande une miette de miséricorde ! Mais Dieu ne sait pas donner des miettes : il donne tout son trésor. Il donne son fils unique. Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, son unique fils ! Nous ayant donné son Fils, comment Dieu pourrait-il ne pas nous donner tout ? Par la foi, nous sommes entrés dans le monde de la grâce, le monde où tout est donné… par Dieu qui donne à tous. Puisque Dieu donne tout à tous, il donnera à ceux qui n’ont pas été encore intégrés au monde de la foi d’y appartenir, il donnera à ceux qui n’ont pas encore été touchés par l’amour de Dieu d’en être bouleversés ; il donnera aux païens d’avoir leur place dans le plan de Dieu. Prenons le temps de dire dans notre cœur : « que ton nom soit sanctifié… par tous ! (silence) que ta volonté soit faite… par tous ! (silence) que ton règne vienne… pour tous » (silence)

            Un dernier mot : si les païens sont traités aussi bien que les croyants, à quoi sert-il d’être croyants ? Les non chrétiens reçoivent de l’amour sans connaître celui qui l’offre. Avoir la foi, ça sert à connaître ce Dieu qui aime tous les hommes et qui est la source de tout amour : n’est-ce pas infiniment appréciable de pouvoir dire merci à celui qui fait tout pour nous ? Pouvoir dire merci à celui qui offre de l’amour, c’est appréciable. C’est ce que nous faisons à la messe.

19ème dimanche du temps ordinaire
13 août 2023

Avant 1ère lecture :

Dimanche dernier, la parole révélait que Dieu ne fait que donner. Aujourd’hui, préparons-nous à entendre comment le Dieu d’amour se comporte avec le mal qui maltraite les hommes comme une tempête maltraite les marins. A notre avis, Dieu devrait agir contre le mal sans patience. Le prophète Elie le pensait aussi, lui qui pensait bien faire en tuant au nom de sa foi 400 faux prophètes… Or il a appris que Dieu n’est pas une force destructrice, à la manière d’un tremblement de terre ou d’un ouragan ; mais qu’il est présent au monde comme un fin silence. Pour entendre le fin silence de Dieu, faisons silence.

Avant la 2ème lecture :

Paul, qui est juif d’origine, souffre de voir que le peuple juif n’a pas accueilli Jésus. A ses yeux, ses frères juifs n’ont pas dans le cœur seulement le refus de Jésus. Au contraire, ils ont des richesses dont la liste est longue. Il serait bien que nous voyions les richesses de ceux avec qui nous ne sommes pas d’accord !

Après l’évangile

La tempête ne se produit pas seulement sur le lac de Tibériade et sur les océans. Les tempêtes… elles ne manquent pas dans les familles, dans les immeubles, dans les communautés… lorsqu’une parole ou un comportement sont jugés inacceptables ou que des violences ébranlent tout un pays… sans oublier les terribles tempêtes qui secouent celui à qui le médecin diagnostique une grave maladie ou à qui est signifié la fin de son contrat de travail. Dans tous ces cas, c’est la tempête, c’est la nuit, …l’impression que Dieu abandonne.

            « Seigneur, sauve-nous » : tel est le cri qui sort de la bouche des malades, des populations terrifiées par la guerre, des personnes battues et trahies, des époux qui se déchirent, des enfants qui voient leurs parents s’agresser, des chrétiens qui constatent que les députés votent des lois contre la nature, des enfants qui sont harcelés… Seigneur, sauve-nous .

            Au milieu de la tempête, dans la nuit, Jésus est venu rejoindre les disciples… Il n’est pas venu comme un fantôme, un revenant, un mort ; il est venu comme un vivant, ressuscité. Il fait encore cela : il est avec nous tous les jours, en toutes circonstances. Plus encore, quand il vient vers chacun, il l’invite à marcher sur l’eau ! Marcher sur l’eau… croire qu’en prenant appui sur la parole du Christ, on peut n’être pas englouti par nos tempêtes. Vous les mariés, bien qu’un couple sur deux connaisse le divorce, vous avez cru qu’en prenant appui sur la parole du Christ, vous ne sombreriez pas dans les tempêtes qui secouent les couples ; n’est-ce pas marcher sur l’eau ? Nous les célibataires consacrés, nous avons cru qu’en prenant appui sur la parole du Christ nous ne sombrerions pas dans les tempêtes de la chair ; n’est-ce pas marcher sur l’eau ?

            Il faut ajouter que chaque fois que nous allions enfoncer, chaque fois que nous étions sur le point d’être en perdition, le Christ nous a tendu la main comme il a tendu la main à Pierre. Vous en avez fait l’expérience comme moi. Personnellement, je sais que le Christ m’a tendu la main pendant des dizaines d’années ; et je trouve que le récit de la tempête apaisée et de la marche sur l’eau exprime exactement ce que nous vivons. Et, si nous arrivons à dire « je crois en toi », c’est parce que comme les disciples, nous avons vérifié que le Christ apaise les tempêtes.

            Une dernière pensée concerne la barque battue par les vagues. Comme l’arche de Noé avait affronté la grande perturbation du déluge et avait apporté du salut, l’Eglise est bousculée par les perturbations de l’histoire, mais elle apporte le salut. Depuis 20 siècles, elle demeure le lieu où l’on reconnaît l’intervention du Seigneur et où l’on fait la profession de foi. Avec tous ceux qui sont dans la barque de l’Eglise, faisons la profession de foi au Christ qui marche sur l’eau, qui piétine ce qui met l’homme en danger. Faisons la profession de foi au Christ qui, comme dit saint Paul, met à ses pieds tous ses ennemis … tous nos ennemis.

Transfiguration du Christ
6 août 2023

Quand Dieu se révèle, il étonne : le Dieu puissant se révèle dans le faible enfant Jésus ; le Dieu puissant révèle sa puissance dans l’impuissance ; le Dieu très exigeant révèle sa justice en étant très miséricordieux ; le moment où Dieu expose sa gloire, c’est le moment de la croix car c’est le supplicié du vendredi saint qui manifeste la gloire de Dieu, l’immensité de son amour.

            Vous avez pu noter deux choses : 1. que les témoins de la transfiguration sont Pierre, Jacques et Jean, ceux-là qui furent les témoins de l’agonie défigurante à Gethsémani ; 2. que juste avant le récit de la Transfiguration, saint Matthieu a placé l’annonce de la passion et l’invitation faite aux disciples à prendre la croix de l’amour et à donner leur vie. Vous avez compris qu’il faut faire un lien entre la gloire de la Transfiguration et la décision de donner sa vie. Autrement dit, les trois témoins, Pierre, Jacques et Jean voient qu’en Jésus qui prend le risque d’être défiguré par fidélité à son amour, il y a l’amour inégalé. Et, revoyant toutes les actions de Jésus, ils s’aperçoivent que Jésus est plein de lumière parce que, partout où il passe, il soigne les blessés, réconforte les accablés, relève les pécheurs… Il est lumineux comme le soleil parce qu’il donne sa vie pour les pécheurs.

Disons : Jésus tu es le Fils bien aimé   –   Jésus crucifié, tu montres l’amour du Père.

            Petite parenthèse : Jésus est plein de gloire parce qu’il paie de sa personne pour les autres ; or il a payé de sa personne en permanence ; donc, il aurait dû avoir en permanence le visage transfiguré qu’il avait lors de la transfiguration. Mais cette gloire nous aurait aveuglés comme le soleil ; alors Jésus a mis le comble à sa délicatesse en cachant sa gloire ; si bien que les gens ne pouvaient pas dire autre chose que « c’est le fils de Joseph » ! Certes, il avait bien manifesté sa gloire en changeant l’eau en vin, en guérissant… Mais jusqu’au jour de la Transfiguration, il n’apparaissait que comme un homme ordinaire. Or il annonçait qu’il serait pendu à la croix, et il devinait que les apôtres auraient du mal d’interpréter cette situation d’impuissance comme l’acte d’amour capable de redonner de l’espérance à tout être vivant. C’est pourquoi il a voulu que, dans la tête des apôtres, se superposent l’image du défiguré et l’image du transfiguré.

Disons : Christ, ta mort révèle ton amour infini

            Frères et sœurs, est-ce que la transfiguration de Jésus vous apparaît comme un conte pour petits enfants avides de merveilleux ? Sans doute pas ! Pourquoi ? Parce que vous considérez que les belles personnes sont celle qui pratiquent le don de soi. J’entends ce que les proches des défunts disent lors des obsèques : ils disent leur estime et leur admiration pour le défunt qui était prêt à rendre service, qui avait pris des décisions difficiles pour faire vivre la famille, qui n’hésitait pas à pardonner et à se déranger pour les autres… Vous voyez qu’on trouve que les personnes pleines de patience, de fidélité, de bienveillance,…sont belles, transfigurées par l’amour. Or, des personnes qui offrent leur compassion, pratiquent l’entraide, se dépensent les uns pour les autres, il y en a partout ; c’est pourquoi nous disons que le ciel et la terre sont remplis de la gloire de Dieu. En fait, tout homme remplit sa vie de noblesse et de beauté dans la mesure où il décide de dire sur lui-même « mon corps livré, je vis pour aider les autres à vivre ».

Disons : Tu me fais entendre l’appel à aimer ;….  tu me donnes ta gloire

——– Elle est en vous, la gloire de Dieu ; vous êtes déjà transfigurés par l’amour ! La preuve ? Combien d’entre vous en effet souffrent par amour, renoncent à ceci par amour, se privent de cela par amour, voudraient prendre sur eux la souffrance d’un proche pour que celui-là en soit déchargé. Donc, pour identifier les moments où vous êtes vraiment vivants, pointez les moments où la décision d’aimer a donné à votre vie sa grande épaisseur. Souvenez-vous qu’à ces occasions, vous avez écouté la Parole, conformément au conseil du Père : mon Fils, écoutez-le ! Si vous écoutez la Parole, le Fils, vous débouchez sur la transfiguration de votre vie.

            Nous allons chanter « nous attendons ta venue dans la gloire » ; pourquoi attendons-nous la gloire ? Parce que, nous qui sommes actuellement défigurés par le péché, nous avons hâte d’être transfigurés dans la gloire, semblables à Jésus.

16ème dimanche du temps ordinaire
23 juillet 2023

Dimanche dernier, l’évangéliste disait que, s’il y a de belles paroles d’amour et de beaux gestes d’entraide, c’est que Dieu en a enfoui les semences dans l’humanité, même dans les coeurs où il y a des cailloux ou des épines, même là où il y a des égoïsmes et des méchancetés qui s’obstinent à étouffer son évangile. Il faut remercier Dieu de donner avec tant de prodigalité. Prenons donc un instant de silence pour dire merci au Seigneur d’être ce semeur qui sème sans retenue sa parole d’amour, son attrait pour la fidélité, la sagesse de sa confiance, la prudence de sa patience, l’attrait de la justice, l’envie de la prière… Prenons encore un instant pour dire merci parce que ces attraits n’ont pas été étouffés par les manières du monde, et merci parce que, dans un monde où règne souvent la loi de la jungle, subsiste en nous l’appel à vivre dans la confiance, dans la fidélité, dans la générosité, dans l’espérance.

Oui, il faut dire merci, parce que c’est miraculeux que la foi soit en nous et nous élève vers Dieu alors que tant de choses cherchent à nous abaisser. L’espérance aussi est miraculeuse, elle qui fait que des parents mettent des enfants au monde alors que les incertitudes et les dangers pour l’avenir sont écrasants. La persistance de la charité est miraculeuse, cette charité qui anime les gens alors que le chacun pour soi fait ses ravages. Merci pour ces miracles.

            Mais, comme les semences du paysan risquent d’être picorées par les oiseaux ou étouffées par les ronces, la Parole d’amour est exposée à son ennemi, la parole du Menteur. La passion illustre cette tragique hypothèse : le Christ « est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas reçu » ; ils l’ont tué.

            Voyant que la Parole d’amour trouve si peu d’écho, on en viendrait à dire que Dieu n’arrivera jamais à régner ; voyant que, en nous-mêmes, il y a, certes, des beaux gestes de sainteté mais aussi le vilain chiendent de nos médiocrités, on arriverait à se décourager… on en viendrait à ne plus supporter les gens médiocres et, plus encore, les gens cruels. Nous pourrions dire que tout est fichu… en langage chrétien, qu’il n’y a pas de Sauveur. Ou que Jésus est un sauveur trop inefficace, incapable d’arracher l’ivraie. 

            Or, que dit le Sauveur ? Quand il présente Pierre le renégat, et Zachée le voleur, il dit que chez les autres et en nous-mêmes, il n’y a pas que le chiendent … et il n’y a pas que le bon grain! Dans le champ de Dieu, dans son royaume, le bon grain et le chiendent poussent côte à côte… Le chiendent n’empêche pas le bon grain. Jésus révèle que, quand Dieu voit que le champ où il a semé le bon grain est colonisé par l’ivraie, Dieu est patient avec les hommes comme les pères sont patients envers les fils dont ils n’approuvent pas la conduite,

            Cette pensée est utile. Parce qu’on entend des gens qui parlent ainsi : si Dieu est bon et tout puissant, il devrait d’autorité, supprimer tous ceux qui font pleurer les hommes. Eh bien d’après la parabole, la toute-puissance de Dieu consiste non à être tyran mais à être patient. (Heureusement que Dieu est patient envers moi !) Il est patient parce qu’il est sûr de la supériorité du bon grain sur l’ivraie. Jésus a traduit cette certitude lorsqu’il a dit « courage, j’ai vaincu le monde », j’ai vaincu l’ivraie !

            Dans le scénario des westerns, il n’y a aucune patience : le clan des bons doit tirer sur le clan des méchants. En revanche, le scénario du Royaume de l’amour est écrit tout autrement car il intègre la patience. Pourquoi le maître dit-il qu’il faut « laisser ensemble le bon grain et l’ivraie » ? D’abord parce que les serviteurs du Royaume ne peuvent pas, à la manière de Dieu, sonder les cœurs et repérer des vertus qui, en fait, dissimulent des vices, des prudences qui cachent des trahisons, des générosités motivées par le désir d’être applaudi… Bref, ils ne lisent pas dans le fond des cœurs et ne peuvent pas séparer l’ivraie et le bon grain. Ensuite, il faut être patient parce que la création est en genèse : elle est encore au temps de la croissance et pas encore au temps de la moisson.

            Nous nous réjouissons chaque dimanche, parce que Jésus a vaincu tout le chiendent du monde ; cela nous aide à supporter tous les jours les injustices, les mépris, les infidélités, les trahisons, les violences… C’est pourquoi nous lui chanterons « gloire à toi qui étais mort, gloire à toi qui es vivant, notre Sauveur et notre Dieu ! Viens juger le monde ! » 

15ème dimanche du temps ordinaire
16 juillet 2023

Après la 1ère lecture.
Les paysans avaient semé et s’est accompli un travail lent, silencieux, transformant ; et ils ont récolté les foins, les regains, les moissons. Le prophète dit que, grâce à la Parole de Jésus, se fait un travail lent, silencieux, transformant. Vous, missionnaires, pensez que quand vous dites la foi, vos paroles ne sont jamais vaines ; elles produisent toujours du fruit. ♫ Tu visites la terre, tu bénis les semailles (psaume)

Après l’évangile
Il est évident que le semeur, c’est Dieu. Mais Dieu dans un tout autre rôle que celui que décrit le poème de la création. Dans le poème de la création, Dieu dit une parole qui a une telle autorité que tout se met en place immédiatement : le soleil, la lune, les plantes… Le Dieu créateur ne rencontrait aucun obstacle. Or il a voulu créer l’homme en lui donnant la liberté, le pouvoir, de mettre à mal l’œuvre de Dieu. Selon la parabole, Dieu sème, et ça ne poussera qu’à condition qu’il n’y ait pas d’oiseaux, pas d’épines… c’est-à-dire pas l’opposition de l’homme. Les paysans savent bien que des aléas compromettent les semailles ; ils disent : « s’il le gel ne brûle pas les pousses, si les orages ne saccagent pas les fruits »… les mariés le savent, eux qui disent « si mon conjoint le veut bien ». C’est la loi de l’alliance. De même Dieu dit « si l’homme veut bien, s’il ouvre quand je frappe à la porte de son cœur ». Frères et sœurs, la réussite du Seigneur dépend de nous.

            Alors il est intéressant de voir comment Dieu se comporte quand l’homme lui met des obstacles. S’arrête-t-il sur un échec ou se remet-il immédiatement à l’ouvrage ? De mille manières, la Bible raconte que Dieu ne se résigne pas à un échec ; même si ses contemporains sont de mauvaise foi et si les disciples ont la nuque raide, Jésus continue de parler. Les oiseaux ont-ils avalé le grain, le soleil a-t-il brûlé le grain… le semeur sème encore. Le matérialisme a-t-il étouffé l’élan spirituel, une épreuve a-t-elle ébranlé la foi … Dieu continue de parler à chacun. Dieu semeur continue d’être le Dieu créateur de vie. Frères et sœurs, dans notre histoire personnelle, nous pouvons constater que Dieu persévère. Nous lui avons fermé la porte mille fois, refusant de vivre selon son amour… il continue de frapper à notre porte et de nous appeler à vivre selon son amour. Nous pouvons faire sa louange ; il mérite la médaille d’or de la persévérance. En un mot : Dieu a la foi, et la foi se vit dans la persévérance.

            Après avoir médité sur la persévérance de Dieu, sa foi et son espérance, méditons un peu sur nous. Comme le Semeur divin, les premières communautés ont semé partout ; parfois leurs semailles ont été compromises par des gens qui ont anéanti la semence évangélique , ce que la parabole appelle des épines, des cailloux ou des oiseaux. Mais parfois, l’évangile est tombé dans une bonne terre Dans la ville de Philippe, connue par la lettre aux Philippiens, la communauté a commencé avec 1 personne du nom de Lydie… mais ça a suffi ; la semence tombée chez Lydie a produit trente, cinquante, cent pour un. Aujourd’hui, les gens à qui nous adressons l’évangile sont comme certains terrains pleins d’épines ou de cailloux… Mais il suffit qu’il y ait un peu de bonne terre ; alors, la parole de Dieu ne manque pas de produire son effet. Puisque Dieu n’est jamais découragé, nous aussi, ne perdons pas courage ; l’évangile est une semence que le matérialisme ne stérilise pas.

            Un jour, Jésus a parlé de sa mort en prenant l’image du grain de blé. Il a fait valoir que le grain est fécond parce qu’il consent à donner toute sa richesse nutritive sans voir immédiatement la germination de la tige et le mûrissement de l’épi. Peut-être que ce qui handicape notre action missionnaire, c’est que nous voudrions voir immédiatement l’effet de nos semailles et nous ne le voyons pas. Les catéchistes ne voient pas ce que produisent les rencontres de catéchisme ; le prédicateur ne voit pas ce que produisent ses homélies. Le semeur qui sait attendre nous apprend à n’être stoppés par l’obsession de l’efficacité immédiate ! Entre l’ensemencement et la moisson à la fin des temps, il y a un temps où des semailles ne produiront rien et d’autres produiront beaucoup. Le règne de Dieu est en cours. Nous sommes invités à faire une profession de foi et à proclamer le succès des semailles que fait le semeur divin. Quand nous faisons cette profession de foi et que nous proclamons « nous attendons ta venue », nous donnons un sens à l’histoire.

14ème dimanche du temps ordinaire
9 juillet 2023

Après la 1ère lecture
Ce texte qui décrit le roi qui vient sur un âne, on le lit le dimanche des rameaux. Le roi qui vient, c’est le bien aimé. Il vient sur un âne, a monture des pauvres. On n’imagine pas un bien aimé qui entrerait chez sa belle avec des allures de conquérant dominateur : le bien aimé ne montre aucune supériorité. De ce fait, si le bien-aimé vient sur un âne, il pourra être compris des plus humbles… comme nous l’entendrons dans l’évangile. Faisons la louange de Dieu qui se fait comprendre des plus humbles. « Mon Dieu, mon roi, je bénirai ton nom toujours et à jamais (Ps 144)

Après la 2ème lecture
Une parole essentielle vient d’être dite : « l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous ». Rendez-vous compte de votre noblesse : vous êtes la maison de Dieu ! Rendez-vous compte de la puissance de vie qu’il y a en vous !
Habite en vous l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts. Cela justifie que nous acclamions Dieu qui nous parle une parole aussi bouleversante ! Alléluia


Après l’évangile  

            J’ai été attiré par plusieurs phrases. Déjà la dernière parole de Jésus : « prenez mon joug ; mon joug est facile à porter ». Je ne vous apprends pas que le joug est une lourde pièce de bois, très solide, qui permet d’atteler deux bœufs au même chariot ou à la même charrue ; cela veut dire que le joug est porté à deux. A vous qui avez un joug à porter, Jésus dit : « ne crains pas, je le porte moi aussi, je marche à tes côtés, du même pas que toi ; nous sommes liés par une alliance » ! Frères et sœurs, pensez que Jésus prend sa part de la peine que vous prenez pour prier, pour servir, pour être fidèles. Sans lui, cela vous serait trop pénible. Mais avec lui vous y arrivez car il est avec vous, doux et humble.


            Autre parole qui mérite notre attention : « venez à moi, vous qui peinez » Je viens de dire la tendresse réconfortante que Jésus offre. Il l’offre à ceux qui peinent et il agit comme le médecin ; son évangile a la tonalité d’une heureuse nouvelle pour le soulagement des hommes. Jésus promet d’alléger le fardeau des malades, des gens seuls, des couples en difficulté, des enfants mal aimés, des gens qui subissent les moqueries parce qu’ils sont croyants… Pas étonnant que le pape demande aux communautés chrétiennes d’être comme un hôpital de campagne, prêt à soigner ceux qui souffrent. …Aux yeux de certains la foi est un fardeau dont il est urgent de se décharger ; mais à nos yeux, elle est au contraire précieuse, car du moment qu’il nous aime, loin de faire peser sur nous des fardeaux, Jésus nous aide à les porter. Si lorsque nous peinons, nous venons à lui, nous sommes soulagés. « Venez à moi, vous qui peinez »


            Une autre parole fait contempler le lien qui réunit le Père et Jésus : « Personne ne connaît le Père sinon le fils » Voilà bien une vérité : nous avons déjà bien du mal à connaître nos proches ; à plus forte raison, nous ne connaissons pas le Père, en ce sens qu’il est père bien autrement que nos pères ; il a de l’amour, de la fidélité, de la bienveillance bien autrement que les meilleurs des pères humains. Les grands mystiques disent que Dieu est le « tout autre », ce qui est une manière de dire qu’il est au-delà de ce qu’on dit de lui. Dieu, nous ne faisons que le chercher… Ceux qui cherchent Dieu, ce sont eux que Jésus appelle « les tout petits » : ceux là reconnaissent qu’ils sont conduits par une main pleine d’amour. Les petits apprécient d’être aidés, ils savent que, seuls, ils n’arriveront pas à remplir leur tâche. Les sages et les savants, en revanche, prétendent qu’ils vont réussir seuls et ils sembleraient déchoir s’ils se faisaient aider. Ne craignons pas d’avouer notre faiblesse : le Christ ne demande que cet aveu ; non pas qu’il tienne à nous humilier en nous faisant avouer que nous sommes faibles, mais il attend que nous lui donnions la permission de jouer son rôle d’allié. Il attend cette profession de foi toute simple : Jésus, je me repose sur toi. Nous dirons ‘je ne suis pas digne, mais dis seulement une parole et je serai guéri’. Et ce qui montrera que nous sommes guéris, c’est que, sortis de l’église, nous prendrons encore le parti des pauvres, de ceux qui ne savent pas, qui ne peuvent pas… C’est en prenant le parti des petits que Jésus a montré le Père ; c’est en prenant le parti des petits que nous connaîtrons le Père et que nous le montrerons.

13ème dimanche du temps ordinaire
2 juillet 2023

Après la 1ère lecture  
Ce récit dit le bonheur d’une femme qui accueille un prophète, un porteur de la Parole de Dieu. En accueillant un porteur de la Parole, elle accueille Dieu lui-même. Et nous aussi, si nous accueillons la Parole à chaque célébration, nous accueillons Dieu. Voilà pourquoi l’Eglise invite à lire la Parole chez soi et à la partager en groupe.
            Que produit la parole quand on l’accueille ? Vous avez entendu, la Parole produit la vie : à la femme sans enfant, le prophète annonce une prochaine naissance. Que la Parole produise la vie, cela ne vous étonnera pas : vos enfants ont vécu autant d’entendre ‘mon chéri, mon amour’, que de manger des tartines ; et ce qui alimente notre envie de vivre, c’est d’entendre « je te fais confiance ; je peux compter sur toi ». Oui ! L’homme vit de la Parole de Dieu parce que la Parole de Dieu fait sortir des impasses, des chemins qui ne mènent nulle part (le chacun pour soi, l’infidélité, la violence mènent immanquablement à des impasses). Ce qu’il faut préférer à tout, l’attitude qu’il faut acquérir c’est d’accueillir la Parole d’amour. Rendons grâce au Seigneur pour sa parole d’amour « Ton amour, Seigneur, sans fin je le chante » (chant du psaume 88)


Après l’Evangile :
La réflexion sur la foi gagne toujours à s’appuyer sur le mariage. On lit parfois, lors des mariages, ces phrases du Cantique des cantiques : « voici mon bien aimé qui vient » ! Effectivement, la foi consiste à reconnaître et à accueillir Jésus, notre bien-aimé, qui vient dire la Parole d’amour ; la foi fait qu’on accueille toute personne qui porte la Parole d’amour comme un prophète de Jésus. La foi consiste à capter les messages d’amour.

            Dès qu’on a éprouvé la joie de savoir que Dieu aime les hommes de tout son cœur, de toute sa force, de toute son intelligence, on se dit que la réponse qui convient, c’est d’aimer Dieu, en retour, de tout notre cœur, de toute notre force, de toute notre intelligence. C’est à dire de mettre Dieu au-dessus de tout, de mettre l’obéissance à l’appel de l’amour au-dessus de tous les autres appels. Le comportement de la femme qui accueillait le prophète Elisée est exemplaire… et ce fut une démarche de vie puisque ayant accueilli la Parole et l’ayant mise au-dessus de tout, elle est devenue mère. Le message d’aujourd’hui est simple : Dieu dit à chacun « ce qui montrera que tu m’accueilles c’est que tu me mettras au dessus de tout ».

            Mettre Jésus au dessus de tout ! N’est-ce pas en contradiction avec le commandement d’après lequel honorer son père et sa mère est le devoir sacré, absolu ? Que comprendre quand Jésus dit que le disciple doit aimer le Christ plus que ses parents (« Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi »). Est-ce que Jésus dit « choisis entre moi et ta femme, entre moi et ton mari, entre moi et tes enfants » ?

            Un cas très fréquent dans la vie de famille montre qu’un amour nouveau ne supplante pas l’amour des parents : c’est quand la demoiselle ou le jeune homme ont trouvé chaussure à leur pied, ils quittent leur père et leur mère… sans pour autant cesser de les aimer. De même que l’amour du fiancé devenu prioritaire n’anéantit pas l’amour des parents, de même l’amour du Christ devenu prioritaire n’anéantit pas l’amour du père et de la mère.

            Plus encore, l’amour en famille a tout à gagner si l’on met Jésus au-dessus de tout : La personne qui aime Jésus va aimer ses parents, ses enfants et ses voisins à la manière de Jésus, en ayant envers eux la patience de Jésus, la bienveillance de Jésus, la douceur de Jésus… et, elle va dire ce que Jésus dit dans son testament : « Mon corps livré pour toi ». La personne qui met Jésus au-dessus de tout va aimer sans égoïsme, sans jalousie, sans possessivité, sans lassitude… Et comme dit l’évangile, cette personne va trouver sa vie, sa joie, son bonheur… Exactement ce que décrivait la 1ère lecture : en accueillant le prophète, la femme a trouvé sa vie, et satisfait son amour maternel. Si elle n’avait pas donné la priorité au prophète elle serait restée stérile, elle n’aurait pas trouvé la vie.

            Puisque nous sommes à la messe, puissions-nous accueillir la parole « mon corps livré pour vous », parole par laquelle Jésus exprime qu’il met les hommes au-dessus de tout. Et puissions-nous exprimer notre décision de mettre Dieu et les autres au-dessus de tout, en disant « mon corps livré pour Dieu et pour les autres »


12ème dimanche du temps ordinaire
25 juin 2023

Avant la 1ère lecture   
            Pendant les deux années de Covid, on a entendu « prends soin de toi ». La personne qui incite à se prémunir d’un danger rend service aux autres… et au nom de la foi, je pense qu’une telle attention porte le sceau de Dieu. Etre prophète c’est alerter sur les dangers des comportements qui génèrent l’injustice et les larmes et indiquer au nom de Dieu quelle manière de vivre génère la paix, la réconciliation et l’espérance. Nous pensons que la personne qui fait cela est utile ; et il semblerait normal qu’elle soit bien reçue. Or on dit qu’elle est dépassée, démodée, pas moderne, qu’elle brime la liberté, qu’elle éteint la joie. Les prophètes sont persécutés et nous parlons peut-être comme le prophète Jérémie. Ecoutons le.

Après l’évangile
            « Ne craignez pas ! Vos cheveux sont comptés ! n’ayez pas peur !» Si ces propos nous sont adressés, c’est parce que, marchant derrière Jérémie persécuté, derrière Jésus persécuté, derrière la communauté de st Matthieu persécutée, nous sommes nous-mêmes exposés.

            Si nous disons que les personnes comptent plus que l’argent, nous voilà qualifiés d’irréalistes ; si nous résistons à la pression des opinions à la mode – concernant les migrants par exemple -, nous voilà renvoyés sur les roses ; si nous disons que par souci écologique de la maison commune, il faut réduire les transports qui génèrent les pollutions, nous sommes accusés de saboter le commerce… Effectivement, quand nous attirons l’attention sur le racisme, le chacun pour soi très injuste, le matérialisme emprisonnant,… nous demandons une conversion coûteuse ; et nous sommes qualifiés de gêneurs, et comme les prophètes, nous sommes persécutés….

            C’est pourquoi au long des siècles, l’Eglise a éprouvé le besoin de se référer à la parole de Jésus « ne craignez pas : Dieu prend soin de tous les moineaux du ciel et vous valez plus qu’eux ; il prend soin de vous ». Ne pas avoir peur de Dieu, évidemment (il est paternel) ; mais surtout ne pas avoir peur des hommes… car les hommes ne peuvent que se moquer ou tuer le corps… « Craignez celui qui peut faire périr l’âme », dit Jésus.

            Quelle était la peur de Jésus ? Jésus n’a pas dit qu’il craignait ceux qui tueraient son corps ; il a dit que ce qui était dangereux, c’était que les disciples s’endorment : il disait « veillez pour ne pas succomber à la tentation qui tue l’âme ». Il nous dit : « ne craignez pas ceux qui se moquent de votre foi ; craignez d’être formatés – endormis – par une société sans Dieu ». Entre parenthèses, beaucoup de parents craignent que leurs enfants soient formatés par une société sans Dieu, sans élévation, une société qui manipule, qui affirme que l’on vit très bien sans référence à Dieu, ou que ce qui importe c’est l’enrichissement matériel… Ca tue l’âme parce que ça détruit la part spirituelle des gens qui en viennent à vivre pratiquement en athées, sans prier, sans se positionner comme prophètes, sans oser aller à contre courant.
Voilà la mort de l’âme.

            S’il ne faut pas craindre, -même si nous sommes comme des brebis au milieu des loups – c’est parce que nous avons un allié qui a scellé une alliance éternelle. L’amour que Dieu a pour le monde est infiniment plus grand que les machinations des hommes qui, d’après la Bible, ne sont, aux yeux de Dieu, pas plus impressionnantes qu’une goutte au bord d’un seau ! S’il ne faut pas craindre, c’est parce que la mort n’a pas résisté à celui qui a aimé de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa force. 

            On comprend que le Notre Père, la prière essentielle, comporte cette demande : délivre nous du mal ! Garde-nous de la tentation ! Nous adressons cette prière au Père qui prend soin des moineaux et prendra soin des hommes bien davantage.

11ème dimanche du temps ordinaire
18 juin 2023

Il me semble que Jésus bouscule mes idées, lorsqu’il dit qu’il faut prier pour que le Maître envoie des ouvriers à sa moisson. En effet, je m’étais mis dans la tête que j’étais envoyé pour semer la Parole de Dieu ; et que nous devions prier pour que Dieu envoie des prédicateurs, des semeurs. Ce n’est pas faux, mais Jésus dit que notre rôle n’est pas de semer mais de moissonner : « la moisson est abondante, priez le maître d’envoyer des ouvriers à sa moisson ».. Cela veut dire que les semailles sont faites, qu’il nous faut constater que Dieu a déjà semé, que les semailles ont déjà produit des fruits abondants… et qu’il nous revient de lier en de belles gerbes à offrir à Dieu toutes les générosités, toutes les bienveillances, tous les pardons,… qui germent sur terre. Tous ces gens qui ont développé leur vocation à éduquer, leur vocation à chercher la justice, voilà la moisson que notre peuple prêtre va offrir au maître. Tous ces gens qui font avancer le monde par leur ouverture aux choses spirituelles, voilà la moisson que notre peuple prêtre va offrir au Maître. Tous ces gens qui construisent un amour, une fidélité… au point qu’on les regarde comme sacrements de la présence de Dieu, voilà la moisson que notre peuple prêtre va offrir au Maître. Quand un époux peut dire à son épouse ‘regarde comme notre amour nous a fait grandir’, c’est la joie ; quand le peuple de chrétiens peut dire à Dieu « regarde ce que tes semailles ont produit », c’est aussi la grande joie. L’action de grâce. Vraiment le royaume de Dieu est déjà là, donné, semé gratuitement, sans qu’il soit mérité.

            Jésus s’est comporté comme un semeur : quand il a eu pitié de la foule qui vit sans but sérieux ou qui n’a comme but que le terre à terre, il a jeté sur cette foule la semence de la Parole. Mais il s’est comporté aussi comme un moissonneur. En effet, à l’Ascension, il a emporté vers le Père l’humanité fécondée par sa parole.

            Alors, il souhaite la collaboration de moissonneurs qui, comme lui, puissent faire en sorte que les épis mûrissent. Il me semble que ce qui fait mûrir, c’est la foi et l’espérance, car un homme sans espérance ne peut pas atteindre sa stature. Alors, vous serez des moissonneurs pour le Seigneur si vous donnez de l’espérance, si vous ressuscitez les morts (c’est à dire, si vous aidez des gens à aller mieux). Vous serez des moissonneurs pour le Seigneur si vous purifiez les lépreux (si vous faites en sorte qu’une personne ne soit plus exclue)… Vous voyez que le champ est très grand, qu’il y faut beaucoup d’ouvriers… Ne priez pas en pensant que le nombre des moissonneurs sera suffisant s’il y a plus de prêtres (ce qui sous entend que les laïcs n’ont pas à se démener) ; priez en pensant que, sur le champ de la moisson, il faut la transpiration des laïcs, de tous les baptisés. Pour faire monter le niveau d’espérance dans le monde, il faut que tous les baptisés remontent les manches jusqu’à donner de leur vie… Merci à tous ceux qui sont les ouvriers du royaume d’amour. Et puis, sachez dire merci à Dieu qui vous a donné une vocation très grande : celle d’être les collaborateurs de l’amour éternel !

            Nous disons cela à la messe : Nous rendons grâce parce que Dieu a semé abondamment, avant que nous arrivions. Nous rendons grâce parce que pour faire mûrir sa moisson, Dieu a placé au centre de son champ l’épi parfaitement mûr : le Christ mort sur la croix. Nous rendons grâce car Dieu nous fait progresser en maturité en nous invitant à donner notre vie pour les autres. Enfin nous prions pour que le maître de la moisson envoie des ouvriers… nous ne prions pas pour qu’il envoie les autres et nous laisse tranquilles ; nous prions pour qu’il nous envoie, nous aussi, à sa moisson ; nous prions pour qu’il fasse de nous des gens qui chassent le démon du découragement, qui guérisse de la lèpre du chacun pour soi, des porteurs d’espérance,


Corps et Sang du Christ
11 juin 2023

Frères et sœurs, Jésus est la Parole de Dieu. Il est notre nourriture, la vraie nourriture : « L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de tout ce qui vient de la bouche du Seigneur.

            Le matin, à midi, le soir, nous avons la chance d’avoir sur la table tout ce qui peut remplir notre estomac ; mais voilà que la 1ère lecture disait « vous les savez bien : ce que vous avez sur la table, c’est important ; mais aussi copieux que ce soit, ça ne suffit pas pour vous faire vivre et faire de vous des vivants. Chacun contrôle le niveau de son compte en banque ; mais voilà que la 1ère lecture disait : votre avoir a son importance, mais ne vous leurrez pas : ce que vous avez en banque, aussi abondant que ce soit, ne fait pas de vous des vivants. Les revendications sociales sont toutes axées sur le pouvoir d’achat, ce qui a son importance ; mais la 1ère lecture dit : « ne vous leurrez pas ; ce n’est pas votre pouvoir d’achat qui suffit à faire de vous des vivants ». On pourrait continuer en disant que les diplômes, les armements, les notoriétés… ne suffisent pas à faire de nous des vivants. L’homme ne vit pas seulement de pain !

            S’il est vrai que l’homme doit absorber ce qui est terrestre, il doit absorber aussi ce qui n’est pas de l’homme, ce qui est de Dieu. Depuis toujours, les hommes ont faim de justice ; or les hommes n’ont jamais produit la justice… Ils ont faim de compassion, mais, même en allant au restaurant, ils peuvent demeurer violents… Ils ont faim d’égalité, mais les sociétés des pays où l’on mange sont toujours inégalitaires… Bref, les hommes qui se basent sur les nourritures terrestres n’y trouvent pas ce dont ils ont faim. Leur faim ne peut être apaisée que par une nourriture qui vient d’ailleurs.

            Frères et sœurs, a ces hommes qui ont faim de ce qu’ils ne trouvent pas sur terre, Dieu offre ce que saint Jean appelle le pain venu du ciel, le Christ. Ainsi celui qui reçoit en lui le Christ reçoit toute la richesse du Christ : sa patience, sa fidélité, sa miséricorde, son souci des pauvres etc… L’homme ne vit pas seulement de pain, seulement des nourritures terrestres. Il vit parce qu’il reçoit de pouvoir être fraternel, parce qu’il reçoit d’avoir l’audace espérer, parce qu’il reçoit de se tenir comme un fils devant son papa, sûr que son papa lui sera fidèle.

            C’est tout cela qui caractérise Jésus ; c’est tout cela qui nous est offert dans la communion. Et cela nous met le cœur en fête : nous faisons la fête parce que « si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement »         


            A la messe, je donne la communion ; cela me bouleverse. Dans le cours des journées, je rencontre, des gens malades, inquiets… et je sais que je réponds mal à leur faim de santé, de justice, d’estime… je sais qu’en les quittant , je ne leur aurai donné que le cadeau dérisoire de ma pauvre parole. Mais voilà que lorsque je donne la communion, moi, l’homme décevant, je dépose dans les mains tendues le trésor inépuisable : le Corps du Christ ; et, en disant « le corps du Christ », je ne peux pas savoir si ces mots désignent l’hostie ou la personne qui la reçoit, parce que l’une et l’autre sont des cadeaux de Dieu ; je sais seulement que cette main qui se tend devient mystérieusement la main du Christ ; je sais que le regard qui contemple l’hostie se posera sur les frères comme le regard du Christ. En donnant la communion, je pense au Christ qui fait confiance à la personne pour qu’elle devienne accueillante, miséricordieuse, ouvrière de la paix, … En donnant la communion, je pense que je donne à chacun le trésor d’être comme une source, comme un cadeau pour ses frères.

            Le prêtre, le diacre, le laïc qui donne la communion est émerveillé de la puissance qu’il communique. Il comprend que, au long des jours, les frères tendent la main, comme des mendiants d’amour, et qu’il a lui-même à tendre les mains comme un mendiant pour que le Seigneur donne à ses mots insuffisants ou maladroits l’aptitude d’aider les autres à vivre. C’est que le vrai pain, celui qui n’est pas décevant, vient du ciel.

SAINTE TRINITE
4 juin 2023

Après la 1ère lecture  
Frères et sœurs, vous avez entendu de quelle manière Dieu parle de lui-même : il se qualifie de « Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité.  » Savourons cette bonne nouvelle : dégustons la ; repassons dans notre cœur ces phrases :
            – Seigneur, dans le monde qui est violent, tu es tendre : merci pour ta tendresse ! –    – Seigneur, dans la société sans miséricorde pour les faibles, merci pour ta miséricorde
            – Seigneur, nos colères n’apportent aucune solution, merci pour ta patience

Après l’évangile       
Les hommes se représentent Dieu comme une superpuissance, souvent redoutable, dont il faut se méfier, qui envoie des maladies et permet des accidents… Or le Seigneur a dit son nom « Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité ». Voilà pourquoi vous aimez Dieu tel que Jésus l’a montré ! Jésus a montré Dieu plein de tendresse pour les gens qui allaient mal, plein de miséricorde pour ceux qui s’étaient égarés… Jésus a montré Dieu lent à la colère, tellement lent à la colère qu’au lieu de punir ceux qui font le mal il prie pour eux « pardonne-leur »… Jésus a montré Dieu plein d’amour, débordant d’amour préférant mourir plutôt que d’abandonner les pécheurs. Alors si Dieu est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour, nous n’avons qu’une chose à faire : nous laisser aimer ; consentir à être aimés ; consentir aussi à ce que les autres qui nous cassent les pieds parfois soient aimés eux aussi autant que nous. Nous n’avons qu’une chose à faire : laisser Dieu être le Dieu tendre en miséricordieux »… et nous en réjouir

            Quand l’Eglise a choisi des textes bibliques pour la fête de la Sainte Trinité, elle a retenu ces textes où il est clair que l’amour fait partie de Dieu : le Père aime le Fils, il aime le monde, il envoie le Fils pour sauver le monde, et l’Esprit Saint offre à toute personne l’amour du Père et du Fils.

            De sorte que l’Eglise parle de la Trinité non pas comme d’un problème où il faudrait démontrer que trois égale un, mais comme d’un amour partagé. Et partagé entre Dieu et les hommes. Tout l’amour que vous avez vécu, que vous vivez, que vous vivrez, n’est autre que la présence en vous de l’amour que le Père offre à Jésus et l’amour que Jésus offre au Père. Vous baignez, vous êtes immergés dans un bain d’amour et vous sentez que votre vocation est une vocation d’amour filial.

            Chez nous, chaque personne a besoin des autres pour exister : à la base du mariage, il y a l’élan qui fait dire : ma raison de vivre c’est toi ; j’ai besoin de toi pour vivre. L’enfant a besoin de ses parents pour exister ; le papa a besoin de la maman pour être père, la maman a besoin du papa pour être mère… nous n’existons que grâce aux autres. Ce besoin de l’autre existe en Dieu, car le Père dit au Fils « je ne peux pas me passer de toi » et le Fils répond pareillement « je ne peux pas vivre sans toi ». Mais admirons que le Père et le Fils disent à chacun de nous : « je ne peux pas me passer de toi ». Je suis renversé qu’à moi, pauvre mortel, le Tout puissant dise « je ne peux pas me passer de toi ». Ma profession de foi découle de là : je réponds « moi aussi, je ne peux pas me passer de toi.

            Cette interdépendance, saint Paul l’a formulée ainsi : soyez d’accord, vivez en paix, exprimez votre amour par le baiser de paix. Il n’exhorte pas seulement à supporter les autres mais à être leurs supporters ; il exhorte à leur dire « je ne peux pas me passer de toi ; ta vie me tient à coeur ». Il plaide donc pour que nos relations soient à l’image de Dieu trinité.

            Une personne m’a demandé : qu’est-ce que la communion des saints ? Le Saint Esprit m’a suggéré de lui répondre ceci : la communion des saints, c’est le fait qu’est donnée aux hommes d’avoir avec leurs contemporains et les personnes déjà parvenues au ciel, les relations qui existent entre les personnes de la trinité. Si Dieu donne tout ce qui est à lui, il donne ce miracle de soutien mutuel, de confiance mutuelle qui est en lui, la communion des saints.

Puisque la trinité guérit de toute division, que cette fête vous donne la paix.

PENTECÔTE
28 mai 2023

« Recevez l’Esprit saint » disait le Ressuscité aux onze apôtres. Je suis sûr que le Ressuscité dit les mêmes paroles à tous les chrétiens du monde et donc à vous, frères et sœurs. Recevez l’Esprit Saint, recevez l’extraordinaire puissance de Dieu, la formidable puissance de l’amour. C’est cadeau, car nous n’avons rien fait pour le mériter ; et c’est LE cadeau, parce qu’avec l’Esprit Saint, nous est donnée, pour que nous restions fermes et inébranlables, la force qui fait passer de la mort à la vie.

            A ce moment de l’histoire, comme à tous les moments de l’histoire, beaucoup d’indices révèlent que l’Eglise est fragile. Alors on s’interroge : « où est cette extraordinaire puissance d’amour ? » Des comportements regrettables font penser qu’au lieu d’être guidée par l’Esprit de Dieu qui fait passer de la mort à la vie, l’Eglise est submergée par des abandons, des tiédeurs, des scandales qui font passer de la vie à la mort. On se demande « où est cette extraordinaire puissance d’amour ? Est-ce que la Pentecôte, c’est une réalité ? »

            Je pense que le Saint Esprit n’agit pas sans les hommes ; en effet, Dieu se révèle comme l’allié des hommes ; il ne fait rien sans eux, et il ne fait rien à leur place, il ne les déresponsabilise pas. Ce cadre de l’alliance étant posé, nous pouvons dire que le don du Saint Esprit nous donne un réflexe, celui de nous demander, devant toutes sortes de situations : « que dirait Jésus et que ferait-il ? » Quand nous parvient un appel à nous déranger par amour et que nous avons les pieds de plomb, l’ES nous inspire cette question : « as-tu raison d’adorer ta tranquillité ? que ferait Jésus ? » Quand un enfant est violé et que la vengeance l’emporterait, le SE nous inspire cette question : « as-tu raison de vouloir guérir le mal par le mal ? que ferait Jésus ? » Quand est stigmatisée une personne à cause de son origine ou de ses manières, l’ES nous inspire cette question : « que dirait Jésus ? » Quand nous serions portés à amasser des richesses pendant que d’autres meurent de faim, l’Esprit Saint nous inspire cette question : « as-tu raison ? que ferait Jésus ? » Lorsqu’un prêtre ne sert pas les gens, mais profite de son statut pour les exploiter, l’Esprit nous dit : « cherche ce que ferait Jésus »…

            Bref au lieu d’être simplement emportés par la loi de la jungle, l’égoïsme, et la condamnation, le SE nous donne de nous référer à une autre loi, celle qui propose de ressembler à Jésus. Bien sûr ! l’Esprit qui nous est donné c’est l’Esprit qui reposait sur Jésus.

            Frères et sœurs, demandez-vous la lumière de l’Esprit ? Si trop de peu de gens appellent l’Esprit Saint, c’est peut-être parce qu’ils craignent qu’il contrarie leurs réflexes… ou parce qu’ils ont peur qu’il leur en demande trop… C’est sûr : si le Saint Esprit vient dans votre vie, vous serez sûrement dérangés. La Pentecôte a complètement transformé les apôtres : ils étaient terrifiés, ils sont devenus audacieux. De même le Saint Esprit souhaite nous transformer… mais c’est pour que notre joie soit parfaite.

            Demandez la lumière de l’Esprit Saint pour vivre demain, ce demain qui est inconnu et donc en partie redoutable. Demandez que soit donné à notre Eglise si fragile l’énergie, la force et la vigueur qui a été mise en œuvre quand Jésus a combattu victorieusement la mort. La vie est en train de nous demander de faire un pas supplémentaire d’amour et de courage.
Nous ne pourrons le faire qu’en priant le Saint Esprit : viens Esprit saint !

– Lave ce qui, en moi, est souillé                              Réchauffe ce qui est moi n’a plus d’ardeur
– Guéris ce qui, chez nous, est malade                      Redresse ce qui l’esprit du mal a faussé
– Assouplis ce que la peur a rendu raide                   Baigne ce que l’habitude a desséché.
– Viens, Esprit Saint.  

6ème dimanche de Pâques
14 mai 2023

Ce dimanche précède la fête de l’Ascension : l’Eglise nous prépare à contempler ce Jésus qui dit : « Le monde ne me verra plus, mais vous, vous me verrez vivant et vous vivrez ».

            Frères et sœurs, parmi les dons que vous fait le Saint Esprit, il y a cette aptitude à voir que le Christ est vivant ! Nous en avons de la chance de constater que Jésus n’est pas enfoui dans les brumes du passé comme Vercingétorix, mais qu’il fait partie de notre présent, qu’il est vivant, actif… En cette messe, il nous faut rendre grâce parce que nous avons avec Jésus un compagnon tel que tout nous rappelle sa présence, que nous voyons tout en pensant à lui.

            Saint Luc disait ( c’était la 1ère lecture) que les samaritains ont constaté que Jésus est vivant quand ils voyaient Philippe, Pierre et Jean faire des guérisons comme en faisait Jésus. Mais permettez que je cite des situations actuelles qui me font penser que Jésus notre ami est vivant ! Je vais faire des visites d’aumônerie à l’hôpital ; je vois des proches déployer mille attentions pour leur malade, je vois des soignants mettre en œuvre leur compétence et multiplier les gentillesses ; je conclus que l’amour est vivant. Face à une peine qui laisse sans voix, une personne prononce la parole réconfortante ; je me dis ‘Cette personne parle comme Jésus ; il est vivant en elle’. Il y avait une dispute… mais quelqu’un a eu le tact de calmer les protagonistes ; j’ai pensé ‘cette personne qui a osé s’interposer et qui a trouvé les mots justes, c’est le Christ prince de la paix qui l’a suscitée !’ C’est vrai, nous le voyons vivant.

            Vous-mêmes, dans un groupe où les propos deviennent méprisant, vous osez dire votre désaccord, et vous dites « c’est le Seigneur qui m’a donné l’audace » ; ou bien, vous vous êtes dérangé pour aider quelqu’un… et vous dites : « c’est le Seigneur qui m’a poussé ». Bref, vous pouvez voir Jésus vivant en vous et sous les traits de toute personne qui vit selon l’Esprit de Jésus. Il ne nous a pas menti quand il disait « Vous me verrez vivant »

            Parmi les milliers de signes, il y a les sacrements. Votre mariage est un signe éminent qui montre que Jésus est vivant. Votre union, vos années de fidélité, de patience, de douceur, de pardon ; votre soutien mutuel, votre lien plus solide que vos déceptions et vos disputes,… n’est-ce pas des indices incontestables que le Christ est vivant en vous ? Merci beaucoup à vous, les couples, les mariés : si, comme dit saint Pierre, vous honorez dans vos cœurs la sainteté du Seigneur, vous mettez sous les yeux des contemporains les manières du Christ. Et si vous voulez vérifier que l’on peut voir Jésus vivant, il vous suffit de regarder les mariés !

            « Vous me verrez vivant ». Cette promesse, si nous ne la vérifions pas, nous n’y croirons pas. C’est pourquoi, un chrétien ne devrait pas se coucher le soir sans avoir écrit au moins un fait observé dans la journée qui montre que Jésus est vivant aujourd’hui. Au bout d’un mois, ce chrétien a 30 indices de Jésus vivant ! ou 360 au bout d’un an ! Faites cela

            Un conte va me permettre de développer l’idée qu’il est important de contempler Jésus présent, vivant aujourd’hui. Un rabbin et l’abbé d’un monastère se rencontraient dans l’amitié et se faisaient des confidences : « Dans mon monastère – disait l’abbé -, les frères n’ont guère d’élan ; on n’a pas de jeunes moines ; à l’hôtellerie, on a de moins en moins de retraitants ; on a du mal d’envisager l’avenir avec espérance ». « Dans ma communauté, c’est pareil – disait le rabbin… » Leur échange ne débouchant sur aucun signe d’espérance, ils décident de prier. Un psaume. Puis un autre psaume. Et au moment de se séparer, l’abbé dit au rabbin « Donnez-moi un conseil ». Le rabbin répondit : « Le messie est l’un des moines » ! Le Père abbé rentre au monastère, réunit les moines et leur dit « Le messie est l’un de nous ». A partir de ce jour, les gestes de prévenance se multiplient, la ferveur anime toutes les activités… et l’hôtellerie se remplit de gens intéressés… et des jeunes se présentent au noviciat…

            Pour que les gens voient que Jésus est vivant, il faut que nous soyons convaincus que le Messie est parmi nous, vivant, présent dans la personne de tout homme. On dit qu’il faut être missionnaire ; nous ne le sommes pas si nous pensons que c’est aux « païens » de se convertir ; nous dirons la présence de l’amour si nous nous convertissons… nous ferons signe aux autres… comme les vieux couples font signe aux jeunes.

            Je termine cette méditation sur la présence du Seigneur vivant, en pensant que Jésus ressemble souvent à un chômeur. Voici ce que disait une personne au chômage : « quand je travaillais, on m’attendait, on me reprochait d’être en retard, on voulait me voir ; maintenant que je sois là ou pas, tout le monde s’en fiche, parce que je n’ai plus d’activité, je n’existe plus ». Jésus doit sûrement parler ainsi : « on voulait me voir, voir mes miracles, on m’attendait… maintenant on ne sait plus voir à quel point je suis présent et actif… Pourtant j’avais dit « vous me verrez vivant ». C’est pourquoi, à chaque messe, nous lui disons : nous t’avons vu vivant, donne-nous encore de te voir vivant ; viens, Seigneur Jésus, nous t’attendons.

5ème dimanche de Pâques
7 mai 2023

Frères et sœurs, une phrase a attiré mon attention : celle où Jésus dit « Je pars dans la maison de mon Père ». A l’hôpital, une malade m’a dit à peu près la même parole : « Si les médecins arrivent à me soigner, j’irai chez mon fils ; si les médecins ne parviennent pas à me soigner, j’irai chez Dieu ». Cette dame avait une admirable sérénité parce qu’elle savait où elle allait ! Jésus sait où il va, il sait où aboutit sa vie. Et ceux qui croient en lui savent aussi où ils vont. Puisque ce que nous faisons a un goût d’éphémère ou d’incomplet, il est précieux de savoir où on va ; car on pourrait dire « J’ai vécu un amour avec mon conjoint, ça débouche sur quoi ? J’ai mis au monde des enfants, ça débouche sur quoi ? J’ai travaillé sans relâche… J’ai gagné en vitalité et maintenant mes forces s’étiolent : vais-je seulement comme les produits biodégradables ? Quand les forces diminuent nous disons d’un air résigné : « c’est comme ça ; c’est la vie» ; à la veille de sa passion, Jésus n’a pas cet air résigné ; il dit « je vais vers le Père »

            Nous sommes baptisés. Si nos parents ont voulu que nous soyons baptisés, c’est parce qu’ils savaient que, grâce à la foi du baptême, nous irions vers le Père, en suivant le chemin qu’est le Christ, en pardonnant comme lui, en payant de notre personne comme lui, en priant comme lui, en nous gardant d’avoir les procédés des païens. Rien de tel pour aller vers le Père que de suivre celui qui va vers le Père, Jésus. Quelques dizaines d’années plus tard, nous avons testé que le projet de nos parents était le bon, et que notre vie à la suite du Christ a du sens, qu’elle débouche chez Dieu, que nous allons vers le Père 

            Une manière simple d’être missionnaire consiste à dire « la vie a du sens, on sait où on va ». Et quand en plus, vous dites « nous allons vers le Père » qui nous aime infiniment, ceux qui vous entendent ne peuvent qu’avoir envie d’aller vers le Père et de partager notre foi.

            Nous sommes nés dans le cœur de Dieu ; il y a un amour infini au départ de notre vie. Et nous retournons vers le Père : il y a un amour infini au terme de notre vie.

                       Une autre parole de Jésus m’a paru importante : Jésus dit « Dès maintenant, vous connaissez le Père et vous l’avez vu ». Alors là, il faut prendre du recul par rapport à ceux qui ne voient que les méfaits, les incivilités, les violences ; prendre du recul, car il n’y a pas que l’absence d’amour ; il y a les signes de l’amour vraiment présent. De même que les contemporains de Jésus disaient en le voyant guérir les malades « il n’y a pas de doute, l’amour de Dieu nous visite ». de même aujourd’hui ; quand des gens voient untel qui se donne de la peine pour les autres, un autre qui réconforte, un autre dont la non-violence apaise, un autre qui est doux, un autre qui cherche le bien des autres plutôt que le sien, … ils peuvent conclure : l’Esprit d’amour est dans le monde. Quand des baptisés vivent conformément à leur baptême, que des couples s’aiment fidèlement, que des gens prient longuement,… nous pouvons dire que le Saint Esprit est dans le monde. Bref, dès maintenant, grâce à l’Esprit saint, nous pouvons voir le Père. Comme l’écrit saint Jean, nous avons reconnu, présent parmi nous, l’amour de Dieu. 

            Pour aller vers Dieu, pour reconnaître l’amour de Dieu présent, célébrons sa louange.

4ème dimanche de Pâques
30 avril 2023

Jésus a dit « je suis la porte » : cela surprend ! Mais toute la Bible nous montre un Dieu qui ouvre des portes, des passages. C’est pourquoi, si Jésus est la porte, il n’est pas une porte qui enferme dans des principes ou des culpabilités ; au contraire, il est la porte qui permet de sortir de ce qui brime la liberté, la porte qui permet de s’en sortir, la porte qui ouvre un avenir !

            Nous le vérifions dans l’histoire biblique. La sortie d’Egypte est l’œuvre du Dieu de Moïse qui a fait sortir ses brebis de leur esclavage. Le retour de l’exil à Babylone, vers 538 avant JC, est l’œuvre de Dieu qui a ouvert la porte du renouveau. Zachée a vu s’ouvrir la porte grâce à Jésus qui l’a fait sortir de sa vie ratée. Pierre, après son reniement, ruminait sa culpabilité morbide : en lui disant « m’aimes-tu », Jésus a été la porte. Et comme est belle la porte que Jésus ouvre devant l’adultère : va, je ne te condamne pas ! La transformation des deux disciples d’Emmaüs (évangile de dimanche dernier) est le fait d’un Jésus qui les a fait sortir de la prison de leur tristesse et du non-sens. Nous-mêmes, mille fois, nous avons constaté qu’une porte s’ouvrait afin que nous sortions d’un égarement, d’un péché, d’une forme de mort. La grâce dont Dieu nous entoure consiste à ouvrir des passages.

            Frères et sœurs, toute l’œuvre de Dieu, toute l’œuvre de Jésus peut être symbolisée par une porte ouverte. Aussi, je vous demande : est-ce que l’évangile représente pour vous une libération, une porte ouverte ? Voulez-vous que nous prenions quelques secondes pour remercier Jésus-Christ d’avoir ouvert des passages là où tout avait l’allure d’une impasse, d’avoir ouvert des portes là où l’évidence nous faisait dire, « on va dans le mur » (silence). Disons ensemble :
            Jésus, berger, tu ouvres des passages (bis)
            Jésus, berger, tu pousses dehors ceux qui ont peur » (bis).
 

         
            Jésus dit aussi une autre bonne nouvelle : « Je suis venu pour que les brebis aient la vie, la vie en abondance ». Certes, étant un pauvre humain, je ne sais pas bien ce qu’est la vie en abondance. J’en dis pourtant quelques mots.

            Avoir la vie en abondance, être un homme vraiment vivant, c’est déjà comprendre que le bon fonctionnement des systèmes respiratoire, digestif, cardiovasculaire ne suffit pas pour faire de l’homme un vrai vivant. Il faut à l’homme ce qu’apporte le Christ. A la vie en abondance l’homme qui connaît Dieu comme le Christ le révèle, c’est à dire comme Père ; l’homme est vraiment vivant s’il apprend et se souvient qu’il est aimé par un Père qui va jusqu’à donner son Fils ; l’homme est vraiment vivant s’il apprend par le Christ qu’il est libre même par rapport à l’échec, au péché, à la mort ; l’homme est vraiment vivant s’il laisse le Christ déposer dans son cœur un amour d’un calibre insoupçonné : « aimez-vous comme je vous ai aimés ».

            C’est la journée de prière pour les vocations. Chacun a une vocation. Mais notre vocation commune, c’est d’ouvrir des portes… comme le bon berger. Or voici ce qu’avait écrit un prêtre pour se rappeler sa vocation d’ouvreur de porte : « Si toi, tu ralentis, les gens s’arrêtent ; si tu faiblis, ils flanchent ; si tu t’assois, ils se couchent ; si tu doutes, ils désespèrent ; si tu critiques, ils démolissent ; mais si tu marches devant, ils te dépassent ; si tu donnes ta main, ils donneront leur peau ; et si tu pries, alors ils seront des saints ». En temps de crise, que chacun soit pour les autres un berger de cette trempe, un être qui ouvre des portes à l’image de tous ceux qui pratiquent l’entraide !

3ème dimanche de Pâques
23 avril 2023

L’évangile a décrit comment, pendant trois ans, Jésus a agi en tant que « Emmanuel », titre qui signifie Dieu avec nous ; il a incarné l’amour auprès des boiteux, des cabossés, des pécheurs. Le récit de la rencontre à Emmaüs montre qu’après sa mort, Jésus continue d’être « Emmanuel » Dieu avec nous. Frères chrétiens, nous déplorons que le monde aille mal ; c’est vrai ! Mais ne perdons pas l’espérance puisque Jésus est « Emmanuel » « Dieu avec nous ».

            Emmaüs ! Cela évoque ce mouvement lancé par l’abbé Pierre et qui vise à ce que des personnes défaites et exténuées retrouvent le goût de la vie, et s’aperçoivent que « Dieu est avec elles. Frères et sœurs, Dieu ne vous laisse pas seuls : il est à vos côtés, il marche avec vous ; il est là pour vous soutenir, vous stimuler, vous encourager, vous relever, vous ressusciter. 

            Voilà pourquoi le prêtre vous adresse le souhait le plus important lorsqu’il vous dit : « le Seigneur soit avec vous ». En effet, bien que nous ne voyions pas le Christ comme nous voyons notre voisin, nous sentons que nous ne sommes pas seuls, que le Christ marche avec nous. Personnellement, X. fois, j’ai pu traverser des caps difficiles ; c’est le signe que le Christ est avec moi. X. fois, alors que j’étais tombé, il m’a été donné de me relever ; mille indices me font comprendre qu’il m’aime. Certainement, vous diriez la même chose. Quelle chance nous avons d’avoir cette foi ! Tout est changé quand on croit qu’on est accompagné par un amour fidèle. Je vais citer deux bienfaits qui viennent de la foi à Emmanuel :

            Quand on croit que le Christ est avec nous, on échappe au sentiment du grand vide. La mort de Jésus avait mis les deux disciples devant un vide vertigineux ; il leur manquait le pilier de leur vie. Et ils ont découvert que Jésus continuait de marcher avec eux et que leur pilier était désormais l’Esprit d’amour. Alors je pense que si les gens se précipitent dans les magasins et veulent posséder, c’est qu’ils ont le cœur vide et qu’ils essaient de le remplir. Mais, évidemment, un cœur fait pour être rempli d’amour ne peut pas être rempli par les choses matérielles ! Celui qui se lève en voulant suivre Jésus, et aimer à la manière de Jésus, celui-là a le cœur tout brûlant et il échappe au grand vide. Sa vie a du sens. 
    
            Autre caractéristique des chrétiens qui croient que Dieu est avec eux : ils jugent le monde, c’est à dire qu’ils sont libres, qu’ils osent échapper à l’air du temps et ont la force de vivre en décalage avec la société. Dans une lettre du 2ème siècle– la lettre à Diognète -, on lit que les chrétiens sont comme tout le monde, soumis aux mêmes obligations, éprouvant les mêmes déceptions et les mêmes joies que les autres… mais qu’ils sont différents, parce qu’en toute chose, ils mettent de l’amour. Vous aussi, vous constatez que les chrétiens sont comme tout le monde, mais différents parce qu’ils mettent leur confiance en Jésus. Tenez, voici un exemple : tout le monde appréhende l’avenir ; mais nous qui faisons la profession de foi en Jésus, nous disons « oui, l’avenir est incertain ; mais Jésus marche avec nous, lui qui est ressuscité, lui dont l’amour l’a emporté sur le mal ; à l’avenir, son amour l’emportera sur le mal ». Voyez ! celui qui reconnaît que le Christ marche avec lui est un homme nouveau.

            Frères et sœurs, écoutez : Dieu dit à chacun « je t’aime, je te fais confiance et… je marcherai avec toi. ». A la messe de tous les dimanches, parce qu’il s’appelle Emmanuel, le Seigneur nous redit : « Je suis avez vous ! Ne craignez pas ! Soyez des hommes forts ! Vous ne serez pas forts grâce aux choses matérielles qui éblouissent et aveuglent les gens, mais grâce à mon Esprit d’amour. »

            Que le Seigneur soit avec vous, tous les jours, jusqu’à la fin.

2ème dimanche de Pâques
16 avril 2023

Frères et sœurs, Thomas n’est pas seul à penser que la résurrection d’un mort est incroyable ; on se demande comment un cœur peut reprendre ses pulsations alors qu’il a cessé de battre depuis trois jours et qu’un soldat l’a transpercé d’une lance. Notre difficulté à croire à la résurrection vient de ce qu’on confond la réanimation d’un cadavre et la résurrection. Jésus n’a pas été réanimé ; il n’est pas, comme Lazare, revenu pour reprendre l’existence qu’il avait… et pour re-mourir ultérieurement. Lui, il est ressuscité ; il est transformé, et sur lui, la mort n’a plus aucun pouvoir.

            L’Eglise qui doit annoncer ce message entend les objections de tous les Thomas. Pour être missionnaires alors que ces objections existent, il nous faut regarder comment le Saint Esprit a fait pour que l’annonce de la résurrection soit crédible (puisque beaucoup l’ont adopté) et que les objections des Thomas ne provoquent plus de blocages. Le Saint Esprit a fait que des prédicateurs ont parlé, que des conciles ont rédigé des professions de foi (nous les disons encore) … Mais ce ne sont pas les énoncés des conciles et des catéchismes qui ont amené les européens (pour ne parler que d’eux) à adhérer à la foi : la lecture des catéchismes ne produit pas forcément des émotions ; ce qui a amené les gens à adhérer à la foi, c’est l’action très émouvante des chrétiens qui recueillaient les orphelins, construisaient des hôpitaux, prenaient soin des veuves, éduquaient les enfants, édifiaient des universités, imposaient des règles aux soldats, pratiquaient le partage… etc… Oui, c’est émouvant de voir l’amour s’incarner et faire de belles choses utiles à l’homme… faire du salut. Ce qui rend crédible l’annonce de la résurrection, c’est la vie renouvelée des baptisés et des communautés. Saint Luc décrit les manières de vivre de ceux qui croient en la résurrection : ils vivent ensemble, en paix, en confiance ; ils considèrent qu’ils ont en permanence une dette d’amour envers toute personne ; ils ne disent pas « ça c’est à moi, et je le garde pour moi » mais ils mettent leur bien au service de ceux qui en ont besoin. Leur foi est active, leur charité se donne de la peine, leur espérance tient bon.

            Ce dimanche, saint Jean Paul II l’a qualifié de « dimanche de la miséricorde » : c’est en effet en pratiquant la miséricorde que les chrétiens disent que Jésus-amour est Ressuscité.
            Alors, à notre époque, dans nos paroisses St Antoine et Ste Trinité, on pourra faire toutes les homélies qu’on voudra et célébrer toutes les messes qu’on voudra… ce sera vain, ça n’attirera personne et ça laissera tous les Thomas dans leur non-foi … ; mais ce sera missionnaire si on consent à adopter les manières de Jésus au risque d’être en décalage avec les pratiques courantes. L’annonce de la résurrection n’est crédible que si chaque baptisé consent à être compatissant selon l’Esprit de Jésus, serviteur selon l’Esprit de Jésus, pardonnant selon l’esprit de Jésus.

            Pour vaincre l’incrédulité de Thomas, Jésus lui montre ses plaies ; comprenons que ce qui atteindra au cœur l’incroyant d’aujourd’hui, ce qui lui procurera de l’émotion, ce ne sera pas nos discours, mais nos plaies ; comprenons que nos contemporains ne seront sensibles à notre foi que s’ils voient que nous faisons pour les frères des choses coûteuses, comme Jésus qui a été fidèle même s’il endurait les calomnies morales et les tortures physiques. Ce qui atteindra au cœur l’incroyant d’aujourd’hui, c’est que nous pratiquions la parole centrale : mon corps livré pour les autres

            Comme dit le Christ ressuscité : que la paix soit avec vous !

Veillée pascale
8 avril 2023

Frères et sœurs, l’Eglise a fait lire bien des textes ; mon homélie ne les égalera pas en longueur ; rassurez-vous. Mais permettez que j’ajoute l’histoire que raconte st Luc.
C’était dans les années 50 ou 60. Pour empêcher Saint Paul de prêcher, ceux qui ne voulaient pas que le message de Jésus soit annoncé l’avaient fait mettre en prison. Comme le gouverneur Festus recevait la visite de son supérieur le roi Agrippa, il lui a rendu compte de sa gestion. Le gouverneur dit au roi : « j’ai dans ma prison un prisonnier qui n’a rien fait de mal ! –Alors pourquoi est-il en prison ? dit le roi. – Parce qu’il dit qu’un certain Jésus est vivant alors que tous disent qu’il est mort » (Act 25,19).
Vous comprenez que, alors que beaucoup disent que Jésus est mort, que c’est un homme du passé, nous affirmons avec Paul que Jésus est vivant.
Ce qui identifie un chrétien, ce n’est pas le fait qu’il se conduit bien, mais le fait qu’il affirme que Jésus est vivant, que l’amour que Jésus a manifesté sur la croix est plus fort que la mort, ou comme dit st Paul, que la mort a été engloutie par la vie. ( 1 Co 15,54 ; 2 Co 5,4), …
Cette nuit, avec grande joie et abondance d’alléluia, nous disons que Jésus est vivant, actif dans le monde

            St Matthieu dit qu’au matin de Pâques, il y eut un tremblement de terre : tout est ébranlé. Le non-amour est englouti par l’amour, l’infidélité est engloutie par la fidélité, les faux dieux qui collaborent avec la mort sont engloutis par le Dieu de vie. Mais déjà avant le drame de la croix , le chacun pour soi était ébranlé par le geste du Christ bon samaritain ; le réflexe qui fait dire « c’est la faute des autres » était ébranlé par la parole du Christ-défenseur qui dit au pécheur « je ne t’accuse pas » ; l’ambition d’être les champions de la justice était mise à mal par celui qui accomplit toute justice en mourant pour les coupables. Frères et sœurs, tous nos logiciels doivent être ré-initialisés en fonction de ces 3 mots : Christ est vivant. Et de ceux-ci : la victoire est à l’amour.

            Alors, frères et sœurs, ce tremblement de terre inquiète ceux qui aiment les idoles (le mensonge, la violence, l’argent), mais ce tremblement de terre nous réjouit ! Parce qu’en rendant la vie à son Fils, Dieu rend la vie à tous les hommes… Et cela dès maintenant.
            Ne voyons-nous pas un miracle de la victoire du Christ dans le fait qu’en France 4000 adultes – et dans notre diocèse 29 adultes – reçoivent le baptême après 2 ans passés à réfléchir à la supériorité de Jésus sur toutes les idoles du moment ? Ne voyons-nous pas un signe de Jésus ressuscité, de l’amour invaincu, dans le fait que beaucoup se dévouent bénévolement, que beaucoup pardonnent, que beaucoup s’entraident… se montrant plus forts que l’égoïsme la rancune ? Ne voyons-nous pas une manifestation de la puissance de Jésus dans le fait que nous vérifions que nous réussissons notre vie en suivant l’évangile alors que la société nous martèle que la réussite est dans l’achat de choses qui n’empêchent pas de mourir ?

            Voici une autre manière de dire la même chose : parce que nos jours sont entachés d’égoïsme, de quelque mensonge, de quelque recherche de soi, de beaucoup de peur… nous ne vivons pas à fond, nous ne sommes pas vraiment vivants. Or la foi en la résurrection de Jésus nous donne de vivre à fond notre travail, notre vie familiale, nos recherches de paix, notre vieillesse. En chantant « Christ est ressuscité », nous affirmons qu’en tout cela, l’amour aura toujours le dernier mot. Le Ressuscité a abandonné dans le tombeau les linges et le linceul qui ne sont pas utiles à des vivants : puissions-nous abandonner ce qui s’apparente à la mort. Si, du haut de leur orgueil, les hommes laissaient tomber ce qui s’apparente à la mort, (les armes, les rancunes, les prétentions…) et qui représente un poids énorme, la terre tremblerait ; mais ça ferait des heureux ! Que le Saint Esprit donne aux hommes de renaître, de ressusciter, de mettre dans le monde le respect, le pardon, la fidélité, le don de soi. Que nos alléluias nous ébranlent !


Fête des Rameaux
2 avril 2023

Au commencement de la Messe, nous avons agité nos rameaux de buis. Nous aussi nous avons accueilli Jésus ; nous aussi nous avons exprimé notre joie de l’accompagner, de le savoir proche, présent en nous et au milieu de nous, comme un ami, comme un frère, aussi comme un roi, c’est-à-dire comme un phare lumineux de notre vie. Jésus est Dieu, mais il s’est abaissé pour marcher avec nous. Il est notre ami, notre frère. En cela, il illumine notre marche. Et ainsi nous l’avons accueilli aujourd’hui.

Et c’est pourquoi nous commençons la célébration des rameaux par la joie ! Ne soyons jamais des hommes et des femmes tristes : un chrétien ne peut jamais l’être ! Ne nous laissons jamais prendre par le découragement ! Notre joie n’est pas une joie qui naît du fait de posséder de nombreuses choses, mais elle naît du fait d’avoir rencontré une Personne : Jésus, qui est parmi nous ; elle naît du fait de savoir qu’avec lui, nous ne sommes jamais seuls, même dans les moments difficiles, même quand le chemin de la vie se heurte à des problèmes et à des obstacles qui semblent insurmontables, et il y en a tant !

Et à ce moment-là vient l’ennemi, vient le diable si souvent déguisé en ange qui insidieusement nous dit sa parole. Ne l’écoutez pas ! Suivons Jésus ! Nous accompagnons, nous suivons Jésus, mais surtout nous savons que lui nous accompagne et nous met sur ses épaules : ici se trouve notre joie, l’espérance que nous devons porter dans notre monde.
Et s’il vous plaît ! ne négligez pas l’espérance ! Celle que Jésus nous donne ! Celle de connaître la joie de Pâques.

5ème dimanche de carême
26 mars 2023

La fête de Pâques nous réjouit parce qu’elle annonce la mort de la mort. Sept siècles avant Jésus, le prophète Ézéchiel a eu la vision d’un charnier, il a entendu que Dieu promettait de faire vivre les morts. Vous écouterez bien cette promesse. J’espère que vous faites partie de cette minorité qui croit que le Saint Esprit donne aux morts une nouvelle création. La majorité des gens ne le croit pas, probablement parce que beaucoup ne savent pas voir comment le Saint Esprit relève chaque jour ceux qui tombent… Puisque nous avons été éduqués à voir que le Saint Esprit habite en nous est y fait son œuvre de résurrection, vous croirez qu’il s’appliquera à ressusciter les morts. Écoutez la promesse !

Dieu a promis d’ouvrir les tombeaux… Il l’a fait quand il a ressuscité Jésus. Ne le fait-il pas dès maintenant ? Par son Esprit qui habite en nous, ne nous remet-il pas sur pieds quand nous sommes abattus ?

Nous sommes des vivants, certes, mais de fragiles vivants guettés par la mort. Le fait que Jésus communie à la peine de Marthe et de Marie en deuil, qu’il s’approche de Lazare qui est mort, et qu’il pleure sans se cacher illustre bien que Dieu est déterminé à libérer de la mort toute l’humanité, et qu’il dit à toute personne « Je suis la vie, sors de la mort : Viens dehors, viens à la liberté !». Frères et sœurs, nous aimons le Christ parce qu’en se montrant apte à faire sortir Lazare de la mort, il montre apte à nous faire sortir hors de l’égoïsme, de la guerre, de l’injustice, du désespoir, … de tout ce qui blesse l’homme.

À chaque messe, nous chantons « le ciel et la terre sont remplis de ta gloire ». La gloire de Dieu, c’est que l’homme soit vivant ; donc Dieu montre sa gloire quand il aide les hommes à sortir de ces formes de mort que sont les rancunes, les jalousies, les infidélités, les péchés contre la fraternité. Or reconnaissez qu’il fait tout ce qu’il peut pour nous remettre sur les bons rails : il suscite des prophètes de la fraternité, des conciliateurs, des artisans de justice,… et grâce à celles et ceux qui consacrent du temps et de la compétence pour aider ceux-ci et ceux là, des personnes se sentent moins seules, sortent du découragement, relèvent la tête… Elles reçoivent un cadeau qui a le goût de la résurrection.

Sors ! La parole de Jésus est une parole créatrice : c’est la parole de Dieu. Saint Jean dit que Lazare est recréé dès que Jésus dit « sors ». Un mort c’est un être qui, suscité par la Parole, va devenir vivant. Ainsi, nos pères ont entendu cette parole et ils sont sortis de l’esclavage de l’Égypte. Il faut que nous entendions cette parole et que nous consentions à sortir de ce qui nous rend esclaves. Dieu nous dit : Sors vite, hâte-toi de sortir de tes rancunes, ne remets pas à demain de tourner le dos à tes mauvaises habitudes ! Dieu nous dit : j’ouvre le tombeau, mais il dépend de toi d’en sortir.

Et la vraie manière de sortir du tombeau de nos mauvais penchants, c’est d’aider les autres à sortir de leur tombeau. Dans le récit, Jésus donne une vocation aux gens : il les charge d’ôter la pierre et de défaire les bandelettes ; il aurait pu le faire et c’eut été moins difficile de réveiller un mort ! Non il compte sur les hommes ; il charge chacun aujourd’hui d’aider son entourage. Puissions-nous savoir que nous avons pour vocation d’aider les autres à vivre. Mais notez ceci : en demandant aux gens d’ôter la pierre et les bandelettes, Jésus leur demandent de défaire ce qu’ils avaient fait, d’adopter un comportement contraire à leur vie précédente : leur vocation est de se convertir. Puissions-nous croire que Jésus est la résurrection et la vie… et nous convertir.

4ème dimanche de carême
19 mars 2023

Avant la 1ère lecture 
  Nous utilisons souvent des expressions comme « je n’y vois pas clair, je ne vois pas ce que je dois faire » ; autrement dit, nous avouons que, même si nous n’avons pas besoin de consulter un ophtalmo, nous sommes malvoyants, pour ne pas dire aveugles. Ce qui trompe notre vue, ce sont les apparences ; par exemple, nous peinons à voir que, derrière des apparences de faiblesse, telle personne a un grand cœur… et nous nous regardons avec trop de bienveillance tandis que nous regardons les autres sans bienveillance… Même le prophète Samuel a du apprendre qu’il n’avait pas la clairvoyance de Dieu. C’était le jour où Samuel devait découvrir qui serait le nouveau roi. Vous noterez aussi que le roi reçoit une onction d’huile, et que l’on donne cette onction aux baptisés. Ecoutons.

Avant la 2ème lecture 
Nous parlions des apparences qui nous aveuglent. Mais notre péché aussi nous aveugle ; la jalousie, la paresse, la colère… faussent notre jugement. Ce qui nous rend la lumière et nous permet de voir les personnes avec les yeux de Dieu, c’est la foi du baptême, la foi au Christ ; car le Christ met de la lumière dans le regard, dans l’intention, dans le jugement… Pensons à notre baptême : nous étions ténèbres ; et comme dit le chant, le baptême nous fait cette invitation « vivons en enfants de lumière »

Après l’évangile       
Nous avons parlé de nos aveuglements. Quelle boue avons-nous sur les yeux pour ne pas voir que notre matérialisme n’apporte pas la joie ? Quelle boue avons-nous sur les yeux pour ne pas voir que la personne qui nous dérange est aimée du Christ autant que nous ? Quelle boue avons-nous sur les yeux pour condamner le Juste et lui faire subir le châtiment des plus grands malfaiteurs ?

            Le savoir-faire des ophtalmos fait voir les couleurs et les volumes, mais ne fait pas voir que Dieu nous aime fidèlement, que les autres sont des frères à aimer, qu’il ne peut y avoir de paix que si nous pratiquons le don de soi, qu’il est anormal que certains possèdent et gaspillent pendant que d’autres n’ont rien, que nous allons laisser à nos enfants une planète empoisonnée… La liste de nos aveuglements est sans fin. C’est le Christ qui fait que nous nous apercevons que nous avons une poutre dans l’œil, que nous sommes aveugles : il nous aide à faire la vérité en nous.

            Ajoutons que c’est en mourant pour nous, pécheurs, que le Christ nous ouvre les yeux. Parce que Jésus consent à être crucifié, nous voyons avec netteté que Dieu nous poursuit de son amour ; parce que le Fils de Dieu souffre les mêmes angoisses que tout le monde, nous voyons que Dieu ne renonce pas à être paternel même si les hommes sont décevants ou offensants ; parce que le Christ a donné sa vie pour la multitude, nous voyons nettement que nos « ennemis » sont aimés de Dieu autant que nous.

            En ce carême, puissions-nous voir que Dieu donne à chacun grâce après grâce… Nous pensons avec joie à toutes les personnes qui se préparent au baptême, parce qu’elles voient les signes de la présence de Dieu. Nous pouvons dire avec elles : «  fais-nous voir, Seigneur ton amour … Fais-nous voir de quel amour tu nous poursuis … Fais-nous voir que tu es vivant.

3ème dimanche de carême
12 mars 2023

Avant la 1ère lecture

Les hydrologues observent que l’au manque dans les nappes phréatiques Et on devine que c’est grave : la fécondité des plantes risque d’être compromise. De la même façon, les chrétiens qui font le carême observent qu’il y a de la sécheresse dans leur cœur, et que la fécondité de leur vie est compromise ; en nous tous, il y a des zones arides, desséchées, stériles… Car nous avons parfois un cœur dur, intransigeant, un cœur sans espérance et sans confiance, un cœur fait pour aimer mais stérilisé par le matérialisme…Quand les gens de la Bible souffrent du manque d’eau, Dieu révèle qu’ils ont soif d’eau pour se désaltérer, mais surtout soif de vérifier que Dieu était bien avec eux, même dans l’épreuve. Je crois bien qu’entre beaucoup de soifs, nous avons soif de voir des signes de la présence de Dieu fidèle.

Avant la 2ème lecture

Nous avons soif de vérifier que Dieu est toujours avec nous dans les épreuves ; en fait, nous avons soif de savoir que nous sommes aimés, quelle que soit notre vertu. D’après saint Paul, la croix où le Christ révèle un amour infini, répond à notre soif.


Après l’évangile.

Qui n’a pas soif d’être compris, d’être valorisé, d’être libéré, d’être aimé d’un amour définitif, d’être pardonné, de vivre en paix… ? La femme que Jésus a rencontrée dans la région de Samarie avait soif de tout cela, elle qui était dévalorisée au point d’aller au puits à midi, à l’heure la plus chaude, de manière à ne pas rencontrer les autres femmes. La femme a vraiment soif d’être valorisée. Mais le récit commence par la parole de Jésus : « j’ai soif, donne-moi à boire ». 
            A chacun de nous Jésus dit « j’ai soif ». De quoi a-t-il soif ? Que devrai-je lui donner à boire ? Parce qu’il désire fondamentalement que nous ayons la vie en abondance, il a soif de nous voir tourner le dos à des plaisirs passagers et décevants ; il a soif d’entendre de notre bouche : « je suis comme une terre sèche, donne-moi l’eau vive de la bienveillance, de la prière, du pardon, du don de soi ; il désire que nous lui disions : donne-moi le saint Esprit, donne-moi de connaître Dieu, le seul trésor qui ne se dévalue pas. 
            Alors, Jésus attendait la femme pour qu’elle connaisse le don de Dieu ; aujourd’hui c’est nous qu’il attend, pour nous donner le don de Dieu, la bienveillance de Dieu, la miséricorde de Dieu, la patience de Dieu… Lui que nous dit « donne-moi à boire », il vous attend pour nous donner l’Esprit qui travaille le cœur et convertit. Ecoutez celui qui vous appelle à aimer; et donnez-lui votre foi, votre confiance, votre certitude qu’il est toujours avez vous.

2ème dimanche de carême
5 mars 2023

Nous parcourons le chemin du Carême, le chemin de Pâques, le chemin vers notre Terre Promise, la vie avec Dieu. Parce que la vie de foi est un chemin, il n’est pas étonnant qu’Abraham, notre père dans la foi, soit un nomade : il se déplace et physiquement et mentalement. La foi suppose qu’on se déplace mentalement. Notez aussi que, parce qu’il se déplace, Abraham pourra engendrer une famille ; de même, si Dieu nous demande de quitter nos principes, nos habitudes, ce sera pour un heureux événement, pour produire de la vie, et plus précisément, pour mettre au monde la présence de Jésus et la rendre manifeste … Notez enfin qu’Abraham se déplace parce qu’il fait confiance à la Parole de Dieu ; sur notre chemin de foi, faisons-nous confiance à la Parole de Dieu … à cette Parole selon laquelle l’amour du Seigneur est sur nous ?

Nous avons une vocation sainte : nous sommes appelés non seulement à voir les effets de la présence de Dieu, mais à voir même le visage de Dieu ! Sans doute, Pierre, Jacques et Jean avaient prié cent fois le psaume 42 : « Dieu, quand te verrai-je face à face ? » Eh bien au jour de la transfiguration, ils ont vu que leur ami qui portait la plus grande attention à chacun, qui nourrissait les foules, guérissait les malades et tendait la main aux exclus… est vraiment Dieu. Ils ont vu qu’un corps humain qui n’agit que par amour est resplendissant de la beauté de Dieu. Notre vocation c’est de voir aussi la beauté de Dieu, la beauté du Christ, en toute personne qui agit par amour.

Tant que Jésus faisait des guérisons, se faisait obéir par les démons et par la mer, les disciples étaient admiratifs et professaient, comme le disait saint Pierre, qu’il était le Messie, que la gloire de Dieu demeurait en lui (nous mêmes, nous pensons facilement que Dieu est partout où ça réussit). Mais Jésus était visé par les complots visant à le tuer ; le jour où les disciples l’ont entendu annoncer qu’il souffrirait et qu’il mourrait, les mêmes qui disaient « tu es le Messie », se sont exclamés « non ça ne peut pas t’arriver de souffrir et mourir (Quand il y a souffrance et échec, personne ne pense que Dieu est présent ; quand il y a souffrance et échec, on dit que Dieu nous abandonne). Eh bien, Jésus a voulu montrer que c’est justement quand il donne sa vie dans les tortures que la gloire de Dieu est au maximum. Jésus a été transfiguré pour nous apprendre à voir dans un homme qui risque d’être défiguré parce qu’il aime, la présence resplendissant de l’amour qui transfigure. Apprenons que l’amour d’une personne est vrai quand cette personne vit son amour quoi qu’il lui en coûte.

Frères et sœurs, vous avez de l’amour dans le cœur. Quand vous donnez votre amour à quelqu’un, vous vous exposez à être affectés par tout ce qui fait souffrir la personne que vous aimez ; vous consentez même à être blessés par les maladresses de la personne que vous aimez. C’est quand vous continuez d’aimer tandis que vous êtes blessé, que vous êtes au top de l’amour. Quand on souffre pour celui qu’on aime, l’amour est réel, la gloire est là. Donc la gloire de Dieu est révélée au mieux quand Jésus est défiguré. On comprend que Jésus soit transfiguré peu de jours avant d’être défiguré. Dieu n’est pas partout sauf où l’on échoue, il est aussi là où l’on meurt par amour.

L’amour, la gloire, est au maximum chez ces parents qui s’usent la santé pour un enfant handicapé ; l’amour et la gloire sont au maximum chez cet époux et cette épouse qui vont tous jours passer des heures au chevet de leur conjoint hospitalisé : ils resplendissent du plus bel amour, parce qu’ils disent à leur conjoint ce que Jésus nous dit sur la croix : « tu m’es tellement précieux que je ne t’abandonnerai pas quoi que j’aie à endurer » ; l’amour et la gloire sont au maximum chez ces éducateurs qui ne comptent pas leurs heures pour tirer quelqu’un d’affaire… Dieu-amour est vraiment partout, pas seulement là où ça réussit, où c’est facile, mais aussi là où c’est difficile, là où l’on souffre par amour.

Le carême nous exhorte à être ainsi transfigurés par la décision d’aimer quoi qu’il en coûte. Je crois que les personnes qui prennent cette décision sont si nombreuses que le monde est vraiment rempli de la gloire de Dieu (comme on chante dans l’acclamation saint le Seigneur). Ayons beaucoup d’ambition : rêvons de gloire ! rêvons de faire honneur à l’humanité en donnant notre vie comme Jésus, en disant sur nous-mêmes « mon corps livré pour vous ».

1er dimanche de carême
26 février 2023

Avant la 1ère lecture  
C’est quoi la condition humaine ? qu’est-ce qui est chez l’homme depuis qu’il y a des hommes ? Dès ses 1ères pages, la Bible constate que l’homme est tenté, que son cœur est le lieu d’un combat. Pour en parler la Bible écrit un récit, un récit qui n’est pas un compte rendu historique ou scientifique, mais qui dit ce qui se passe en nous à tout moment.

Après la 1ère lecture
Vous avez entendu : il s’agit de ce que font Adam et Eve, c’est-à-dire Monsieur et Madame Toutlemonde. Il s’agit donc ce que je fais, ce que vous faites. Que faisons-nous ? Comme Adam, comme tout homme, nous écoutons la voix de Dieu mais aussi une autre voix… qui suggère de décider nous-mêmes de ce qui est bien et de ce qui est mal, sans nous référer à Dieu… Quand la voix du Père dit « ce qui est bien c’est que tu accueilles les autres comme des frères », une autre voix me dit : « les autres te gâchent ta vie, ne t’occupe pas d’eux » ; j’entends cette voix et me croyant plus sage que Dieu, je dis « Dieu a tort, quand il me demande d’accueillir les autres, il ne veut pas mon bien » (c’est ça le péché). La voix du Père dit « tu es heureux si tu pardonnes » ; mais l’orgueil me dit en boucle « ne te laisse pas marcher sur les pieds, fais valoir ton bon droit » ; j’entends cette voix et me croyant plus sage que Dieu, je dis « Quand Dieu me demande de pardonner, il a tort, il ne veut pas mon bien » (c’est ça le péché). Depuis qu’il y a des hommes, ils sont pollués par un esprit qui les convainc que Dieu n’est pas paternel et ne veut pas leur bien. Tous nos péchés commencent par ce moment où nous laissons s’installer en nous l’idée que Dieu ne veut pas notre bien et l’idée que nous sommes assez grands pour savoir ce que nous avons à faire. De même qu’on promeut l’écologie pour prendre soin de la planète, de même l’évangile présente une écologie pour prendre soin de notre liberté, pour nous empêcher d’obéir à n’importe quoi, d’être prisonniers de l’esprit du mal. 

Après l’évangile

Le 1er récit disait qu’Adam, tout homme, est pollué par la prétention de savoir mieux que le Père ce qui est bien et ce qui est mal. Dans l’évangile, Jésus est révélé pur de cette pollution, lui qui se réfère exclusivement à la Parole du Père, parce qu’il pense que le Père est le seul à savoir ce qui est bien et mal. En ces deux récits sont décrites les manières dont Adam et Jésus affrontent le Tentateur.
Pendant ce carême, il nous revient d’écrire un 3ème récit racontant comment nous affrontons le tentateur. Nous aurons, comme Jésus, la tentation de l’abondance (non pas changer les pierres en pain, mais penser qu’on vit seulement de nourritures terrestres) ; nous aurons comme Jésus la tentation de l’apparence (non pas nous jeter du haut d’un mur, mais tout faire pour que les autres aient une bonne opinion de nous, et même nous faire applaudir) ; nous aurons comme Jésus la tentation de la puissance (non pas dominer la terre, mais diriger, avoir raison, en famille, avec les voisins et les collègues) Notre société cède à ces tentations… et on voit ce que ça donne : des gens enlisés dans le matérialisme, ne se souciant que du compte en banque, chacun n’ayant aucun scrupule de prendre les autres en otages. Il serait bien que notre carême nous fasse croire que Dieu est plus sage que nous, et nous fasse ainsi préférer le partage à l’abondance, la modestie à l’orgueilleux souci d’épater, le service à la puissance. Le carême est une démarche pour une écologie de l’homme
            Le carême est fait pour changer d’air. L’air du chacun pour soi, du matérialisme, de l’infidélité…nous l’avons déclaré pollué ; puissions-nous laisser entrer l’air frais de Jésus, de l’attention au frère. Puissions-nous renaître, partir sur des bases nouvelles, avoir d’autres références que le jugement des autres, et la seule perspective du virement de la retraite !

            Qu’est-ce que Dieu fait pour l’homme ? Il fait qu’il soit comme Jésus, extrait de l’emprise de Satan. Rendons grâce car chaque fois que nous avons résisté à l’esprit du mal, cela nous a été donné par Dieu, cela a été un miracle

7ème dimanche du temps ordinaire
19 février 2023

Frères et sœurs, les brutalités abondent. Elles engendrent quasi toujours le réflexe de la vengeance. Je dis « quasi toujours », car ce n’est pas toujours. Je pense à un homme : son enfant a été tué dans un attentat et aux voyous qui voulaient monter les gens les uns contre les autres, il a envoyé le message suivant : « vous vouliez ma haine ! nous n’aurez pas ma haine ». Cet homme étouffe la haine ; il est sage. Car la vengeance ne solutionne rien. On verrait avec un plaisir certain que celui qui a fait du mal soit puni sévèrement : « ça lui apprendra ». Ca lui apprendra quoi ? Même la justice humaine pratique la violence qu’elle reproche au délinquant ; donc si elle ne fait que punir, elle ne peut rien apprendre au délinquant. Elle a seulement la sagesse de fixer des punitions proportionnées au délit. Mais la justice humaine ne brise pas le cycle où, à toute violence, succède une autre violence. Elle n’ouvre pas la possibilité de vivre ensemble en paix ; elle n’est pas vraiment une sagesse.

            Seul Dieu est sage ; seul l’amour est sage. Vous le vivez en famille. Que fait le parent quand l’enfant fait un acte qui le blesse ? Le parent qui est blessé par l’acte mauvais de son enfant le réprimande, mais ne se venge pas au sens où il ne sanctionne mais pas pour le plaisir de blesser : il ne rend pas coup pour coup, il éduque et peut-être il montre un plus grand amour. Parents, en excluant la vengeance, vous montrez l’image de Dieu qui, pour éduquer les hommes, répond aux blessures que lui inflige l’humanité, non pas en se vengeant, mais en donnant son fils jusqu’à la croix.

            Les relations sont parfois difficiles ; on a parfois envie de mordre, comme des loups. Or quand Jésus dit « je vous envoie comme des agneaux au milieu des loups » ; il ne dit pas « je vous envoie comme des loups au milieu des loups ». Il dit « Je vous envoie comme des agneaux ! Pas pour vous faire mordre ! mais pour désarmer ceux qui mordent, pour que la prétendue sagesse humaine qui préconise la vengeance soit remplacée par une vraie sagesse qui engendre la paix.

            Cette vraie sagesse se formule ainsi : « tu aimeras ton ennemi, tu n’auras aucune pensée de haine contre ton frère, contre ton conjoint, contre ton collègue… et tu n’attendras pas qu’ils fassent le premier pas sous prétexte que tu es dans ton bon droit ». C’est la sagesse de Dieu. Car, regardez le Seigneur sur la croix : l’avez-vous vu exprimer une pensée de haine contre ceux qui le blessent ?

            Les personnes qui viennent se confesser font une magnifique profession de foi, lorsqu’elles disent : « Bénissez-moi, parce que j’ai péché » ; elles ne disent pas « parce que j’ai péché, tu vas me punir » ; elles disent qu’elles sont sûres que le Seigneur ne répond pas à la blessure en se faisant blessant mais en bénissant. Celles qui disent « bénissez-moi parce que j’ai péché », ont observé que le Seigneur n’a de pensée de haine ni contre Judas qui a préféré 30 pièces d’argent… ni contre Pierre le renégat ; il lui tend la main en disant « m’aimes-tu ». Jésus insulté n’a pas rendu l’insulte ; maltraité, il n’a fait de menaces à personne. Lui qui a été livré aux bourreaux, il les a livrés à l’action du Saint Esprit, croyant que ses ennemis pouvaient s’améliorer. Jésus, lui, casse l’enchaînement offense – répression.

            Frères et sœurs, nous désirons tous inverser la courbe des violences : alors réentendons la commandement : « tu n’auras aucune pensée de haine contre ton frère ». Nous qui allons supplier « dis seulement une parole et je serai guéri, lavé », voilà l’unique parole que Dieu nous dit : « tu n’auras aucune pensée de haine, de vengeance, contre ton frère ». Puisque l’Eglise va me proposer de faire, pendant le carême, un grand ménage de printemps, il convient que je laisse le Christ faire en moi ce grand ménage, c’est à dire que je le laisse me convertir.

            Si au ciel, Dieu répond à l’offense par le pardon, la prière nous conduit à demander que sur terre, on réponde à l’offense par le pardon. Père, que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel.

6ème dimanche du temps ordinaire
12 février 2023

Frères et sœurs, la plupart d’entre vous sont des parents. Vous n’avez pas exercé ce rôle seulement le jour où vous avez engendré, mais tout au long des années, en donnant à vos enfants un cadre, des repères, des lois. Ainsi, Dieu notre Père exerce son rôle en nous disant ce qui nous conduira à la vie, la loi de la vie. Dieu est père-créateur particulièrement quand il donne la loi de vie. Comme les lois humaines nous font grandir humainement, la loi de Dieu nous fait devenir des hommes selon Dieu. Donc étant engagé envers nous comme un père l’est envers ses enfants, Dieu nous indique le chemin de la vie, et ensuite, il nous laisse libres : nous conduisons notre vie comme nous l’entendons. Mais Dieu nous avertit : si nous choisissons de suivre Dieu, nous décidons notre croissance ; si nous choisissons une conduite morale sans Dieu, nous déclenchons notre appauvrissement. Le Livre de Ben Sirac dit « tu as devant toi la vie ou la mort… ça dépend de ton choix » Admirons Dieu qui, en nous donnant la liberté, nous permet de créer avec lui et aussi de défaire la vie, de décréer.

            Hélas, nous sommes allergiques aux commandements ou bien, nous ne les pratiquons qu’extérieurement. Ainsi, la loi qui interdit de tuer, nous ne la transgressons pas extérieurement (nous irions en prison) mais nous prononçons des mots meurtriers ou nous souhaitons secrètement que l’autre disparaisse de notre paysage (là, nous appauvrissons notre humanité) ; la loi qui met en garde contre l’adultère, nous l’observons bien extérieurement, mais pas forcément intérieurement (là, nous appauvrissons notre humanité). La loi qui met en garde contre les faux témoignages, nous l’accommodons : notre oui n’est pas suivi d’un engagement ferme, notre non n’est pas suivi d’une résistance ferme ; quand notre oui n’est plus un oui, nous sommes humainement bien appauvris.

            Il me semble que nous perdons notre noblesse si nous admettons des actes contraires à Dieu sous prétexte que tout le monde fait ces actes.

            Comme dit Saint Paul, nous sommes malheureux ; effectivement nous avons entendu ce qui peut rendre heureux et bien vivants et nous choisissons ce qui – même tout en restant secret, intérieur – rend automatiquement malheureux. Alors Jésus diagnostique que l’homme ne va pas bien si, sous un bel aspect extérieur, il a un cœur malade d’avoir blessé le contrat d’alliance. C’est pourquoi, il veut inscrire la loi dans notre cœur, intérieurement. Il dit : on vous a dit comment être extérieurement fidèles à l’alliance ; moi je vous dis comment être intérieurement fidèles à l’alliance. Jésus a bien fait de venir et de nous dire qu’il est insuffisant de soigner le comportement extérieur et qu’il faut soigner l’attitude intérieure, les pensées.

            Ce qui fait de Jésus un être exceptionnel, c’est qu’au lieu d’obéir extérieurement à la loi d’amour, il y conforme toutes ses pensées. Ce qui fait des chrétiens des hommes nouveaux, c’est qu’au lieu d’obéir extérieurement à la parole de vie, ils y conforment leurs pensées. Prenons bien conscience que nous ne serons heureux que si nous obéissons profondément à la Parole de Dieu. On dit habituellement que Jésus était plein de vie ; permettez moi de dire la même chose avec d’autres mots : Jésus était en parfaite santé quand il obéissait à sa vocation en s’exposant par amour aux souffrances, aux fouets, aux clous, à la lance. Jésus nous donne son commandement d’amour, parce qu’il nous voit en mauvaise santé comme l’était Pierre quand il reniait son maître… Nous avons sans doute la même pathologie C’est pourquoi nous pouvons dire dès maintenant : fais moi entendre ta parole et je serai guéri.     

5ème dimanche du temps ordinaire
5 février 2023

Vous les cuisinières, avec un peu de sel, vous sauvez les plats de la fadeur. Si Jésus dit que nous sommes « le sel », c’est qu’il a mis en nous le sel de l’évangile, de la pauvreté, de la confiance, de l’humilité, de la miséricorde, de la paix, de la justice… et qu’il nous fait confiance pour sauver notre entourage familial, professionnel et ecclésial de la fadeur des relations distantes, des méfiances, des indifférences et de la pollution du matérialisme.

            Dans nos fermes de montagne, les paysans pratiquaient la salaison des viandes pour empêcher leur décomposition. Si Jésus dit que nous sommes le sel, c’est qu’il nous fait confiance pour empêcher la décomposition de la société qui se morcelle par le fait que beaucoup s’intéressent à leurs avantages plus qu’au bien de tous.

            Actuellement on réduit les éclairages ; la lumière coûte cher ; elle est donc précieuse. Or, comme le disait Isaïe à Noël, notre société marche dans les ténèbres ; elle a besoin de lumière. Si Jésus dit que nous sommes lumière, c’est parce que l’Esprit saint reçu au baptême et à la confirmation nous a rendus capables d’indiquer à nos proches ce qui vaut la peine d’être vécu. Ceux qui ont en eux la lumière de la fidélité, du pardon, de la justice, suggèrent un chemin droit et noble, comme les phares maintiennent les conducteurs sur la route.

            Jésus croit en nous ! Il nous croit capables d’être sel alors que nous risquons d’être fades ; il nous croit capables d’être lumière, alors que nos conduites sont loin d’être brillantes. Le Seigneur croit en nous, il nous choisit comme apôtres, parce qu’il nous aime ! Il faut lui dire merci pour sa confiance.

            Vous avez entendu : Jésus ne dit pas « je suis le sel et vous êtes la salière ; je suis la lumière et vous êtes le lampadaire, je suis le trésor et vous êtes l’emballage ». Mais il dit « vous êtes le sel, la lumière » ! Pourquoi ? Parce ce n’est pas nous qui vivons, c’est lui qui vit en nous. Chrétiens, croyez en votre dignité : le Christ vit en vous ! En fait l’Eglise, c’est ce peuple dont les membres ne sont pas à l’abri de perdre la saveur de leur baptême, la ferveur de leur confirmation, la douceur de l’évangile,… mais sur qui Jésus ressuscité dépose en permanence le sel et la lumière de sa présence. Et heureusement, car, quand nous nous laissons aller, que nous nous affadissons, que nous quittons l’attitude filiale et l’attitude fraternelle… nous devenons des baptisés dénaturés, et nous ressemblons à un cierge éteint, à un téléphone sans sa carte Sim, à un ordinateur sans mémoire… bref, si notre sel s’affadit, nous sommes des êtres vides. Mais nous confessons que le Seigneur envoie constamment le saint Esprit pour donner à l’Eglise d’être sel et lumière ; la preuve, c’est que, même si notre sel s’affadit, il y a des frères qui ont assez de sel en eux pour semer des graines d’espérance dans un monde alarmiste, pour dire des paroles de paix là où sévit la violence, pour promouvoir la bienveillance là où règne la dérision.

            Un dernier mot. Le baptisé n’est pas sel et lumière tout seul ; c’est l’Eglise qui est sel et lumière ; ce sont les communautés, les équipes qui sont sel et lumière. Je fais donc un plaidoyer pour chacun s’adjoigne à une équipe : soit une équipe de visiteurs de malades (on appelle cela le Service évangélique des malades), soit une équipe liturgique, soit à l’équipe du secours catholique, soit à l’équipe des catéchistes, équipe de partage biblique, etc… Il faut être ensemble pour être sel de la terre et lumière. « On verra que vous êtes mes disciples si vous vous aimez, si vous n’êtes pas seuls ».

            Notre Eglise reçoit de sévères critiques ; parfois son sel perd sa saveur ; parfois sa luminosité ne saute pas aux yeux. Il n’empêche que, parce que le Saint Esprit est en elle, elle ne cesse pas d’engendrer des gens qui donnent à la société le bon goût de la justice, de l’espérance, de la fraternité… Rendons grâce à Dieu !

4ème dimanche du temps ordinaire
29 janvier 2023

Frères et sœurs, quand des catholiques constatent la raréfaction de nos rangs, ils sont préoccupés et expriment leur inquiétude.
Nos assemblées vieillissent, et comptent peu de jeunes ; c’est préoccupant. Mais est-ce que cela préoccupe le Seigneur ? Apparemment non, puisque le prophète Sophonie énonçait de la part de Dieu : « Je laisserai chez toi un peuple pauvre et petit ». Cette parole étonne : Dieu qui, dans sa puissance, a créé le ciel et la terre, n’est pas capable d’avoir un peuple nombreux ! Pourtant, cette parole porte en elle le sceau de Dieu qui fait Pâques.
A ce moment central, son Fils a connu l’extrême faiblesse et il a reçu de Dieu l’extrême puissance ; il a souffert d’être parfaitement minoritaire (abandonné de tous) et il a reçu de Dieu d’être suivi par la foule innombrable des saints. Autrement dit, comme dit saint Paul, Dieu choisit ce qui est faible pour confondre ce qui est fort ; et c’est dans la faiblesse qu’il déploie sa puissance. Si le Fils de Dieu a dû passer au plus bas, il ne faut pas s’étonner que son Eglise passe au plus bas ; il faut consentir à ce que l’Eglise ne soit plus influente, majoritaire, il faut consentir à être chrétiens dans un monde qui ne l’est pas. Réécoutons le prophète Sophonie : « je laisserai un peuple pauvre et petit »

            Il n’y a pas que la petitesse numérique de l’Eglise ; il y a sa petitesse qui vient de ce qu’elle ne peut pas se prévaloir d’être influente. Or, dans les béatitudes, Jésus déclare heureux les petits, ceux qui ne peuvent se prévaloir ni d’être un grand nombre, ni d’être influents, ni de représenter une force. Jésus déclare heureux ceux dont la petitesse est d’être faite de pauvres de cœur, de gens qui pleurent, de personnes qui ne peuvent lutter que par la douceur et la miséricorde, et même de personnes persécutées… Voilà ceux qui forment la cour du Christ roi.

            A l’occasion du décès de Benoit XVI, l’évêque de Poitiers a rappelé une phrase écrite par Benoit XVI en 1969 (il y a 54 ans) dans son livre « Foi chrétienne hier et aujourd’hui ». Je la cite car elle réexprime que l’Eglise a pour vocation d’être « un peuple pauvre et petit » : « De la crise actuelle sortira une Eglise qui aura beaucoup perdu, qui sera de taille réduite et devra repartir de zéro… Avec la réduction du nombre des fidèles, elle perdra de nombreux privilèges… Contrairement à la période antérieure, l’Eglise sera perçue comme une société de personnes volontaires qui s’intègrent volontairement et par choix. En tant que petite société, elle sera appelée à faire beaucoup plus souvent appel à l’initiative de ses membres ». (pages 114-115)

            Les béatitudes disent qu’il faut faire un acte de volonté, pour consentir à toutes les formes de pauvreté. Acte de volonté pour se détourner du matérialisme et croire à la puissance de l’amour. Acte de volonté pour remplacer le réflexe d’écraser l’autre par la décision de pardonner. Acte de volonté pour tenir à l’amour, à la justice, à la fidélité, alors que l’amour, la justice et la fidélité ne sont pas aimés. Sophonie disait la condition à remplir pour être l’Eglise en situation minoritaire : « ce petit reste prendra pour abri le nom du Seigneur ; ne commettra pas d’injustice, et n’aura pas de langage trompeur ». Benoit XVI le disait : n’appartiendront à l’Eglise que « des personnes volontaires » 

            Donc, soyez en paix. Au début Jésus a eu bien du mal à conserver 11 disciples… c’était le petit reste… Il n’empêche que ça a suffi pour que le monde bénéficie du bon levain de l’évangile. Un petit nombre de gens qui « auront pour abri le nom du Seigneur, qui ne commettra pas d’injustice et n’aura pas de langage trompeur… un petit nombre de gens pauvres de cœur, miséricordieux, artisans de paix, assoiffés de justice…suffira à porter dans nos villages le bonheur de suivre le Christ. Ce n’est pas par le grand nombre que nous installons l’évangile dans notre monde, mais pas un petit reste de pauvres de cœur qui préfèrent le pardon à l’écrasement de l’autre, la soif de la justice au confort personnel. La bataille contre Madiane dont nous parlions dimanche nous apprend à ne pas regarder les statistiques mais à repartir du Christ, de l’humilité du Christ, de ce foyer d’amour qui s’exprime ainsi : mon corps livré pour vous. Notre Eglise chez nous doit peut-être passer au plus bas… mais le Père va la ressusciter. Dieu déploie sa puissance dans les faiblesses.

3ème dimanche du temps ordinaire
22 janvier 2023

Après la 1ère lecture  
Dieu annonce une grande lumière dans des régions où règne ces formes de mort que sont la guerre et la recherche effrénée de l’argent… Or, le nord du pays d’Israël (là où habitent les tribus de Zabulon et de Nephtali) est un lieu convoité par les voisins de l’actuelle Syrie ; là bas, c’est la guerre ; les gens sont malheureux, comme dans la mort. Avez-vous entendu : le prophète annonce que le peuple malheureux va recevoir un cadeau inattendu comme lors du combat contre Madiane. Je vous raconte ce combat daté vers 1200 ans avant Jésus. (cf Juges 7) Cet épisode nous intéresse parce que nous aussi, il nous faut tenir le coup alors que nous nous sentons peu nombreux pour résister à une société qui tient pour rien la foi chrétienne.

            Le chef d’armée Gédéon avait mobilisé 32 000 hommes pour combattre les envahisseurs. Le Seigneur lui dit « c’est moi qui vous ferai gagner le combat et non pas votre grand nombre ; renvoie les soldats qui ont peur ». D’un coup, l’armée s’affaiblit de 22 000 soldats. Il en restait 10000. Dieu dit à Gédéon : « les soldats sont encore trop nombreux ; si vous gagnez le combat, vous direz que c’est grâce à votre grand nombre (voyez que nous avons la même tentation : désirer être nombreux) ; Dieu dit donc : conduis les hommes au bord de l’eau et regarde comment ils boivent ». Gédéon vit que des soldats lapaient l’eau comme des chiens : Dieu lui dit « va au combat avec ceux là » : ils n’étaient que 300. Partis 32 000, ils ne sont plus que 300. Et cette armée minuscule a gagné et elle a compris que la victoire était un don de Dieu et non une performance humaine.

            Il en va de même pour nous : face à la non foi de nos proches ou de toute la société matérialiste, notre fidélité et la survie de l’Eglise est un don de Dieu qui donne le salut.

Après l’évangile

            Je l’ai dit, dans notre pays, dans nos villages, s’étend le nuage noir du matérialisme, du chômage, de la peur de l’avenir, du chacun pour soi, de la solitude,… et aussi parfois la moquerie de certains non-chrétiens. Et nous avons peur parce que nous sommes minoritaires. Or St Matthieu dit que Jésus a installé son quartier général en Galilée, là où on ne pense qu’à gagner de l’argent, là où on néglige la religion. Parce que le pays marche dans la nuit, Jésus s’y installe, comme lumière. De même, Jésus ressuscité veut vivre dans nos villages sous les traits de ceux qui pratiquent la fraternité et la justice ; ainsi les gens verront la lumière de la sagesse ; ainsi les enfants et les adultes auront envie de baser leur vie sur Jésus.

            Jésus est lumière : il vit une totale fidélité alors que nous tombons dans l’infidélité. Il porte à chacun une attention délicate alors que nous sommes souvent indifférents. Il meurt pour les autres alors que nous trouvons que les autres nous gênent. Et, comme dit st Paul, il est seul à faire cela ; même les plus grands apôtres ne le font pas.

            Comment les gens de nos familles et de nos villages pourront percevoir que Jésus est lumière ? Forcément, ce sera grâce à nous, si nous répondons à l’appel de Jésus comme André, Pierre, Jacques et Jean. Si vraiment nous vivons la foi, si nous pratiquons la fidélité et la miséricorde, les gens diront que Jésus est vraiment la lumière du monde. 

            Il a appelé ainsi André Pierre, Jacques et Jean pour porter sa lumière. Jésus cherche des collaborateurs chez nous. Ecoutez le : il vous dit : veux-tu servir les enfants ? veux-tu porter mon amour aux personnes âgées seules ? veux-tu consentir à donner du temps pour ta paroisse ? Et fondamentalement « veux-tu me suivre en donnant ta vie » ?

            Un dernier mot ; ce dimanche est au milieu de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens. Catholiques, protestants, orthodoxes, tous disent que Jésus est la lumière. Puissions-nous dire à notre entourage « Christ n’a que de l’amour pour vous ; Christ est actif dans le monde ».

2ème dimanche du temps ordinaire
15 janvier 2023

Dimanche dernier, en fêtant l’épiphanie de Jésus Christ : nous nous réjouissions de constater que le Christ attire à lui non seulement les quelques mages païens, mais encore tous les non-chrétiens d’aujourd’hui. Saint Paul formulait cela en disant : « les païens sont associés au même héritage ». Aujourd’hui nous nous réjouissions d’entendre Jésus dire qu’il veut travailler à ce que tous connaissent le Père. Il a dit en effet :

♫ « Me voici Seigneur, je viens faire ta volonté »

            Jésus a entendu dans son cœur cette parole : « Parce que tu es mon serviteur, je compte sur toi pour révéler aux hommes que je leur pardonne, que je les bénis, que je veux les rendre libres et enlever leur péché»… A cette parole, Jésus répond « Me voici, je viens faire ta volonté » A cause de ce « me voici », je suis prêt à assurance qu’un pardon est offert à ceux qui ont trahi et méprisé, nous aimons Jésus. A cause de ce « me voici », je suis prêt à montrer que Dieu ne pense qu’à bénir les enfants et les adultes, nous aimons Jésus ; à cause de ce « me voici », je suis prêt à tout faire pour que les gens soient libres, nous aimons Jésus.


            Jésus et Jean Baptiste étaient cousins ; ils se connaissaient. Mais, tant que Jean Baptiste n’avait pas entendu Jésus dire « me voici », il ne connaissait pas vraiment Jésus. Le jour où il s’est aperçu que Jésus allait remplir l’importante mission d’ouvrir les yeux des hommes pour qu’ils voient la bonté de Dieu, il a conclu : Jésus est forcément sous la mouvance de l’Esprit de Dieu ! Il fait vraiment la volonté de Dieu, il est l’agneau de Dieu.

♫ « Me voici Seigneur, je viens faire ta volonté »

            Chaque fois que nous venons à l’église, le Saint Esprit nous rappelle que nous avons une mission. Aujourd’hui, Dieu nous dit « je compte sur toi » ! A tout moment, il nous appelle à aimer et à aider les autres à vivre. Dieu dit à celui-ci « tu ferais bien de donner un peu de temps à ton voisin », à celui là « tu ferais bien de faire le premier pas pour mettre fin à une querelle ». Et quand une personne a besoin d’être écoutée, quand un groupe a besoin d’être défendu, quand une idée méprisante est énoncée, Dieu nous dit « vas-tu rester sans rien dire ? ne pourrais-tu pas faire quelque chose au nom de l’amour qui te baigne ? ». Dieu appelle et donc il dérange (il n’y a que les idoles qui ne dérangent pas !). Si la volonté du Père c’est que tous connaissent le pardon, soient aidés à vivre, nous qui sommes les serviteurs de Dieu, il nous faut répondre au Père ce que le Fils a répondu :


♫ « Me voici, je viens faire ta volonté ».

            Encore quelques mots à propos de cette parole que prononce Jean Baptiste et que le  prêtre répète à chaque messe : « voici l’agneau de Dieu qui enlève le péché du monde » L’envoyé de Dieu vient sous la figure de l’agneau et sur lui repose la colombe ; l’agneau et la colombe, deux symboles de douceur ; la mission de Jésus sera donc d’agir dans la douceur. Mais la douceur de l’agneau, Jésus l’incarnera en se laissant conduire à l’abattoir sans rien dire, et en devenant l’agneau pascal, l’agneau qu’on tue pour le manger en signe de communion avec Dieu qui fait la libération fondamentale de Pâques. A chaque messe, nous faisons mémoire de la libération de Pâques et nous mangeons l’agneau de Dieu : Heureux les invités au repas des noces de l’agneau. Ainsi, quand Jésus dit « me voici », nous disons avec lui :

            ♫ Me voici Seigneur, je viens faire ta volonté .

Epiphanie
8 janvier 2023

Frères et sœurs, st Matthieu montre des païens qui sont attirés par le Christ. Voilà un vrai motif de fête : comme la limaille est attirée par l’aimant, comme l’aiguille de la boussole est attirée par le Nord, les païens sont attirés par le Christ. En témoigne le constat que pendant trente ou cinquante ans de mission, avant d’écrire le récit des Mages, les communautés chrétiennes de Paul et de Pierre ont vu des païens s’adjoindre à elles, embrasser la foi, en disant que le Christ est leur lumière. A Ephèse, à Rome, à Corinthe, à Thessalonique… le Christ a attiré les païens parce qu’il est comme une étoile qui brille dans la nuit du paganisme ; l’Eglise nous suggère de croire que le Christ luit dans la nuit de notre société matérialiste qui s’occupe de tout sauf de la vocation spirituelle de l’homme. A nos yeux la lumière des néons publicitaires ne peut pas rivaliser avec la vraie lumière, l’étoile qu’est le Christ ; car sa vérité est attirante, sa justice est attirante, sa miséricorde est attirante, ses saints sont attirants, le Christ est attirant.

            Alors saint Matthieu parle « des mages » , il ne dit pas combien ils étaient, mais il dit qu’ils apportent trois cadeaux. La tradition a donc décidé qu’ils étaient trois. Peu importe leur nombre. La première remarque à faire c’est qu’ils marchent. Celui qui est attiré par le Christ sent l’urgence de se déplacer mentalement ; de sortir des ténèbres des violences pour donner la paix… comme à la messe ; de chasser la nuit de la voracité à posséder pour faire l’offrande … comme à la messe ; de quitter la tristesse de l’individualisme pour avoir des liens communautaires… comme à la messe. Comme les mages, il faut nous déplacer et faire taire le refrain habituel « on a toujours fait comme ça ». Moyennant ce déplacement vers la paix, vers l’offrande, vers les liens communautaires, tout à une couleur nouvelle. Pour en jouir, en famille, en quartier, au travail…., osons nous convertir. Le Christ est venu dans la crèche une 1ère fois sans nous ; il a fait briller sa lumière devant les mages sans nous. Mais actuellement pour faire briller sa lumière, il compte sur nous, ce qui suppose que nous nous déplacions. Le Christ exerce un attrait, il nous déplace, nous dérange. Si le Christ ne dérange rien dans notre vie, c’est que nous ne lui faisons guère de place. Il n’y a que les idoles qui ne dérangent pas.

            Il faut faire une 2ème remarque : à ces mages qui se déplacent, il fallait une boussole. Leur boussole a été une communauté à qui ils ont demandé « où est le roi ? » On ne trouve pas le Christ sans une communauté ; on ne trouve pas le Christ sans l’Eglise. Alors certains disent qu’il y a tellement de pécheurs dans l’Eglise qu’il faut s’orienter sans elle. Attention ! Quelqu’un qui est pécheur peut montrer le Christ. L’Eglise est comme le doigt qui montre l’étoile ; alors il ne faut pas regarder le doigt mais regarder l’étoile ! Ainsi les mages ne se sont pas préoccupés de la sainteté de leurs informateurs. Et ces informateurs, tout pécheurs qu’ils étaient, avaient en main la boussole, les Ecritures. Aujourd’hui l’Eglise n’est pas irréprochable, mais elle ouvre les Ecritures et elle en donne le sens… bien qu’elle soit faite de pécheurs… dont je fais partie.

            Une troisième remarque concerne le geste de l’offrande. Parce que le Christ est roi, les mages lui ont offert l’or ; parce qu’il est Dieu, ils lui ont offert l’encens ; et parce qu’il allait entrer dans la mort pour la faire mourir, ils lui ont offert la myrrhe qui servait à l’embaumement. Au Christ qui est roi, qui est Dieu et qui nous fait vivre en tuant la mort, nous devons une offrande, celle de notre personne : offrons-lui notre santé, notre confiance, notre fatigue, notre temps de prière… et le fruit du travail des hommes, y compris celui des païens… Nous offrir nous mêmes, c’est le vrai culte. Jésus s’est offert lui-même.

            Dernière remarque : les mages sont repartis (ça veut dire que le cruel Hérode n’a pas pu empêcher que Jésus attire et rencontre les païens) et ils sont repartis par un autre chemin. Nous-mêmes, ayant trouvé le Christ, l’étoile, nous ne suivrons plus le chemin du découragement, mais celui de l’espérance ; nous ne suivrons plus le chemin du matérialisme mais celui du partage ; notre vie sera nouvelle… Parce que la lumière aura brillé dans nos coeurs.

            Frères et sœurs, saint Paul a raison de dire que l’étoile qui brille dans le paganisme actuel, c’est le Christ et sa parole. Ainsi nous pouvons regarder les personnes « des périphéries » comme des personnes appelées autant que nous à connaître la joie de la foi au Christ. Frères et sœurs, le Christ nous a attirés, il attire toute l’humanité, lui la vraie lumière

Marie, mère de Dieu
1er janvier 2023

Frères et sœurs, je ne doute pas que vous soyez tout à fait sincères quand vous souhaitez la Bonne Année. Pourquoi, en effet, ne souhaiterions-nous pas sincèrement à une personne malade qu’elle guérisse, à un enfant qu’il grandisse, à une personne tourmentée qu’elle accède à la paix ?

            Pourtant, je présume que la sincérité de vos vœux, est accompagnée d’un doute : avons-nous de vraies raisons de penser que 2023 sera meilleure que 2022 ? Pas vraiment ! Nous ne sommes pas naïfs ; il est probable qu’en 2023 l’humanité rencontrera les mêmes problèmes qu’en 2022, voire de plus terribles. De ce fait, il est possible que nos vœux aillent à l’encontre de toute probabilité. Mais nous y tenons parce que nous avons de l’espérance : notre espérance n’est pas naïve ; elle sait que les problèmes seront là… mais elle sait aussi ce que savait Marie, Mère de Dieu, elle qui avançait vers l’inconnu du lendemain, tout comme chacun.

            Je parle de Marie, car nous commençons l’année avec la fête de sainte Marie Mère de Dieu… Sainte Marie qui met Dieu au monde. Elle savait que le Puissant fait des merveilles pour les hommes, qu’il comble de biens les affamés, qu’il relève ceux qui tombent, qu’il tient ses promesses. Bref, nous faisons des vœux au nom de l’espérance de Marie, parce que nous sommes sûrs qu’au long des mois à venir, le Seigneur marchera avec nous, avec tous, et qu’il sera puissamment actif. Alors, quand nous souhaitons « bonne année » à une personne, nous disons non pas une formule creuse, mais une bénédiction. Frères et sœurs, vos vœux sont des bénédictions. Ils consistent à dire : même si, inévitablement, notre année va comporter des problèmes, Dieu agira en toi et pour toi, et je te souhaite de t’en apercevoir.

            Rappelons-nous la première parole : c’est un modèle de vœux : « Que le Seigneur te bénisse et te garde… qu’il t’apporte la paix … qu’il fasse briller sur toi son visage et qu’il te prenne en grâce ». Pourquoi n’enverrions-nous pas ce message à nos correspondants ? Avec de telles paroles on est dans le domaine spirituel, la grâce ! la faveur de Dieu ! « Que le Seigneur t’apporte la paix ». Qu’il t’apporte bien sûr la fin de tes querelles, mais qu’il t’apporte aussi des relations fraternelles, un développement harmonieux, un itinéraire qui te permette d’accomplir ta vocation. Frères et sœurs, ne croyez pas que les prêtres sont seuls à pouvoir bénir : vous-mêmes, bénissez vos proches, vos amis, vos voisins : dites leur « que le Seigneur t’apporte la paix… » Dire la bénédiction, dire les vœux, c’est dire que les hommes sont visités par l’amour de Dieu, et pas seulement livrés aux aléas des malheurs possibles. 

            Marie est justement celle par qui, en la personne de Jésus, Dieu a pu visiter les hommes, être proche des malades, dire de l’amitié aux exclus, tendre la main aux condamnés. Au milieu des hommes inquiets de leur avenir, Marie a mis au monde Jésus qui est vraiment Dieu avec les hommes, Emmanuel

            Alors si Jésus est Emmanuel, il est juste de dire, par nos vœux, que les familles seront le Temple du Seigneur tout comme l’était l’étable des bergers. De dire que les écoles où les profs s’appliquent à mettre de la lumière dans la tête des enfants seront éclairées comme était éclairée par l’enfant l’étable de Bethléem. De dire que le Seigneur tiendra la main des personnes immobilisées dans leur fauteuil ou sur leur lit. Le cadre de vie de chacun sera le Temple du Seigneur. Que peut-on souhaiter de mieux ?

            En vous disant mes vœux, j’aimerais donc savoir dire à chacun : marchons dans l’espérance puisque Dieu est pour nous ! Puisque Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? Marchons dans l’espérance vers la nouvelle année. Bonne année !



NOËL
25 décembre 2022

Frères et sœurs, parmi les chants de Noël, le plus traditionnel est « il est né le divin enfant ». Et l’évangile de ce jour de Noël nous dit que cet enfant divin est le Verbe de Dieu, celui par qui Dieu veut nous parler (pour comprendre le mot Verbe il faut penser à l’expression verbale). Ainsi, Jésus vient dans le monde pour exprimer qui est Dieu ; il le fera en étant celui qui enseigne, celui qui relève, celui qui tient à continuer d’aimer même quand il est malmené et torturé, car Dieu est celui qui enseigne, relève, et aime même ceux qui ne sont pas aimables. Donc, pendant les années où Jésus a vécu en Palestine, Dieu s’est exprimé par un Jésus adulte ; mais, aujourd’hui, méditons sur le fait que Dieu s’exprime par Jésus enfant.

            L’enfant, les parents le diraient mieux que moi, c’est le cadeau. Et il n’y a que Dieu qui donne ce cadeau qu’est l’enfant. Evidemment Dieu ne l’offre pas dans un emballage de papier doré tenu par des rubans. Il offre l’enfant dans l’emballage qu’est l’amour des parents. Le cadeau qu’est l’enfant, c’est la vie ; une vie qui n’est polluée ni par l’orgueil de dominer, ni par les relations marchandes donnant-donnant ; une vie qui est réussie parce que son mode de relations n’est fait que de câlins et de risettes… Alors que nous prétendons que nous sommes surtout vivants si nous dominons les autres par l’orgueil, l’argent ou les armes, nous devons avouer que nous sommes incapables de produire l’enfant qui domine puissamment par sa tendresse. Aujourd’hui, à Noël, plus que jamais, devant le cadeau qu’est l’enfant, nous professons que le Dieu d’amour nous parle par l’homme réussi, par l’enfant prince de la paix, par l’enfant roi de justice, par l’enfant qui détruit la guerre parce qu’il ne sait qu’aimer… 

            Les familles expérimentent qu’à sa naissance, l’enfant, c’est le cadeau ; elles expérimentent aussi que, dès sa naissance l’enfant occupe sa place dans la famille en tant que frère. L’enfant qui naît est non seulement mon frère mais aussi le frère dans toute la fratrie. L’enfant de Bethléem, Dieu nous le donne comme frère de tous, le frère universel. Il est possible que beaucoup fêtent la naissance de l’enfant Jésus parce qu’ils pressentent que leur désir de fraternité est porté par ce Jésus. Si je crois que Dieu s’est fait enfant et si je crois qu’il s’exprime par l’enfant-frère, je devrai être fraternel avec tous ; je devrai considérer les autres comme des frères, et je devrai me convaincre que Dieu me parle par eux, qui sont des fils de Dieu, autant que moi. Nous ne choisissons pas nos frères ; nous choisissons d’être frères. Et Noël fait sentir l’urgence d’incarner la fraternité. Un sage disait que le jour se lève quand on est capable de distinguer un frère en tout humain. Dans l’humanité, ce qui est brillant ce n’est pas l’autorité des armes ou du savoir ; il n’y a qu’une étoile qui brille : c’est la fraternité. Voyez ! L’enfant de Bethléem est vraiment la parole de Dieu parce qu’il est le frère universel ; et Dieu nous parle par tous ceux qui s’appliquent à vivre fraternellement. La fraternité, c’est la vérité de la parole ; nous vivons de la qualité des paroles qui nous sont adressées ; et la Parole de Dieu qu’est Jésus le fraternel est la parole de qualité, la parole de vérité.

            L’enfant, c’est le cadeau ; l’enfant, c’est le frère ; il faut dire aussi que l’enfant c’est la confiance. Dans les bras de sa maman ou de son papa, l’enfant a une totale confiance. Et un tel enfant est un modèle puisque Jésus dit que pour être ses disciples, c’est à dire vivre dans la foi, il faut devenir comme un enfant plein de confiance. Nous, les adultes, nous sommes parfois les champions de la méfiance : nous ne croyons que ce que nous voyons, nous calculons, nous voulons maîtriser… Eh bien, Dieu nous parle par l’enfant qui fait confiance. Regardez les enfants à l’âge où ils font confiance : ils sont pour vous parole de Dieu.

            Après avoir parlé de l’enfant, mon dernier mot sera pour vous, les parents. Vous êtes à l’image de Dieu : quand vous donnez à vos enfants votre temps, votre attention, la nourriture, l’affection…, vous ne donnez pas un salaire, ni des récompenses ; comme Dieu vous donnez des cadeaux. Le Dieu qui fait des cadeaux habite en vous. Voilà la cause de votre joie à Noël.


4ème dimanche de l’Avent
18 décembre 2022

Permettez-moi de rappeler que pendant l’avent, nous fêtons 3 venues du Christ. Nous ne nous concentrons pas seulement sur la venue de Jésus à Bethléem, quand il a fait sa première venue ; nous regardons aussi comment en tant que ressuscité il vient chaque jour visiter l’humanité et nous regardons aussi vers le jour où « il reviendra dans la gloire » : ce sont ses trois venues.

            Dimanche dernier, l’évangile faisait regarder Jean Baptiste et donnait à entendre comment il invitait les gens à préparer le chemin, pour que le Seigneur vienne aujourd’hui, c’est-à-dire qu’il soit visible et reconnu ; aujourd’hui l’évangile fait regarder Joseph et Marie, de sorte que nous voyions comment ils ont fait en sorte que celui qui porte tout l’amour de Dieu soit visible et reconnu.

            D’abord, Marie. Elle avait donné son accord : « je suis la servante du Seigneur, je mettrai toute ma vie au service de la mise au monde de celui qui porte tout l’amour du Père ». On admire la disponibilité de Marie. Mais observons que pour mettre au monde tout l’amour du Père, elle n’a rien fait d’autre que ce que font toutes les mamans : elle a pris soin du bébé, préparé les repas, fait les lessives, conduit l’éducation, et continué de parler gentiment avec les voisines … Vous les parents et grands parents, en tenant votre rôle en famille, en pratiquant la confiance, la patience, le don de vous-mêmes, comme Marie, vous mettez le Christ au monde, vous rendez tangible l’amour de Dieu …. Bien sûr il faut que, comme Marie, vous fassiez cela sans orgueil, en toute douceur, avec modestie… comme des servants et servantes du Seigneur. Et vous qui pratiquez le bénévolat de toutes sortes de manières, vous diriez sans doute que vous ne faites rien d’extraordinaire ; mais Marie aussi ne faisait rien d’extraordinaire ! En aidant les autres à vivre, vous mettez le Christ au monde, vous rendez tangible l’amour de Dieu.

            Joseph, lui, s’est trouvé devant une situation inhabituelle, du fait que son épouse était devenue enceinte miraculeusement. Lui aussi, en faisant confiance à la Parole de l’ange – c’est-à-dire à Dieu-, il a mis au monde cette attitude qui n’est pas « de ce monde », cette attitude qui appartient au Christ, lui que nous admirons parce qu’il « fait toujours ce qui plait au Père ». Ceci est remarquable ! Je suis loin de faire toujours ce qui plait au Père ! En croyant à la fidélité de Marie son épouse qui n’était pas enceinte de lui, Joseph a obéi à la voix du Seigneur et non pas au bon sens. Eh bien, aujourd’hui, je suis sûr qu’il y a beaucoup de personnes qui font de même : au lieu de refuser l’étranger (ce qui est le bon sens aux yeux de beaucoup), ils accueillent ; au lieu de tenir des propos racistes (ce qui est légitime aux yeux de beaucoup), ils pensent que tout homme est un frère ; au lieu de dire « moi d’abord » (ce qui est le réflexe commun), ils paient de leur personne pour d’autres… En un mot, ils mettent au monde les signes qui montrent que le Ressuscité est là.

            Mettre au monde quelque chose du Christ, c’est aller à contre courant et affronter une opposition : c’est pourquoi Dieu nous dit ce que l’ange disait à Joseph : « ne crains pas ». Nous ne pouvons mettre au monde les signes de la présence du Ressuscité que si nous maitrisons le réflexe de la peur : « ne crains pas ». Comment chasser la peur ? En faisant confiance à la Parole, comme Joseph. Frères et sœurs, ne craignez pas ; vous aurez la joie de mettre au monde des trésors qui appartiennent à Jésus ; vos proches apprécieront de voir votre patience, votre douceur, votre recherche de la paix ; bref ils seront heureux de voir que l’amour de Dieu est présent près d’eux ; en un mot, vous serez utiles à la société. Et vous ressemblerez à Marie, la servante du Seigneur.
           

3ème dimanche de l’Avent
11 décembre 2022

La 1ère parole commençait ainsi : « Le désert et la terre de la soif, qu’ils se réjouissent »… Ce 3ème dimanche de l’avent est appelé « dimanche de la joie » , car la Parole attire notre attention sur le fait que Dieu travaille résolument à apporter le salut. Comme dit le psaume : il ouvre les yeux des aveugles, aux affamés, il donne la pain, il délie les enchaînés. Dieu ne reste pas sans rien fait quand les hommes sont dans la difficulté. Jean Baptiste, depuis sa prison, a appris que Jésus ouvre les yeux des aveugles, qu’il donne du pain aux affamés, qu’il délie les enchaînés. Lui, il avait douté de la qualité de Jésus en demandant « devons-nous en attendre un autre » ; eh bien, son enquête l’a conduit à conclure que Jésus réalise bien les œuvres de Dieu, qu’il est bien celui qui doit venir et qu’il n’y a pas lieu d’attendre un autre sauveur.

            Frères et sœurs, il est indispensable que nous menions la même enquête : est-ce que, à notre époque, comme à l’époque de Jean Baptiste, le Seigneur guérit ? Est-ce qu’il encourage, est-ce qu’il relève ? Est-ce qu’on a de la joie quand on repère les signes de son action ?

            Les membres de la communauté de saint Matthieu se demandaient si Jésus était le sauveur puissant qu’annonçaient les prophètes puisqu’il ne les libérait pas de la persécution. Peut-être nous interrogeons-nous pareillement : puisque Jésus ne met pas hors d’état de nuire les violeurs, les assassins et les traîtres, puisqu’il ne met pas fin aux haines, aux injustices, aux mépris et aux maladies…avons-nous eu raison de lui donner notre confiance ? Puisqu’il se présente comme le puissant, ne devrait-il pas abattre les faiseurs de mal comme le bûcheron abat un arbre ? Est-il vraiment le médecin de l’humanité ? Ne devrions-nous pas nous tourner vers Mohamed ou vers Bouddha ? ou plus radicalement, manger, boire faire du commerce et ne pas nous poser de question ?

            Puisque la question de Jean Baptiste se pose aujourd’hui, réécoutons le résultat de son enquête : Depuis que Jésus est là, les aveugles voient, les boiteux marchent, ceux qui sont déclarés pas aimables sont manifestement aimés… Oui, nous avons bien fait de donner notre confiance à Jésus qui prend soin de ses frères, qui fait avancer ceux qui sont paralysés par la peur, qui manifeste sur la croix qu’un amour sans limite est offert aux mal aimés.

            Comment agit le Seigneur ? Par nous, ses disciples ! Il nous dit « fortifiez les mains défaillantes, affermissez les genoux qui fléchissent, dites aux gens qui s’affolent ‘prenez courage ». Frères et sœurs, une voix vous murmure : « prends soin de ton frère, le voisin qui déprime, le vieillard qui est seul, le jeune qui tâtonne…». C’est pourquoi, il est utile de repérer les appels à aimer qui nous sont adressés… et à y répondre. C’est même un grand honneur de prendre soin de quelqu’un, car celui qui prend soin d’un frère rend visible la présence du Christ dans le monde… il met le Christ au monde, comme Marie… Donc si vous aidez les éclopés en tous genres à s’apercevoir qu’ils sont aimés, c’est vous qui avez raison
 
            En voyant mille délicatesses posées sur des faiblesses et des blessures, nous conclurons que Jésus est bien l’envoyé de Dieu. En voyant mille mains tendues aux réfugiés, aux endeuillés, aux personnes seules… nous concluons que le Christ est vivant et qu’il rend les gens capables d’apporter au monde la vraie vie. Bref, comme Jean Baptiste, nous voyons les signes de l’Esprit Saint. (Et nous en collectons dans notre précieuse boite).

            Du coup, notre prière est stimulée : Viens Seigneur Jésus ! Venez divin Messie ! Nous attendons ta venue !

2ème dimanche de l’Avent
4 décembre 2022

Frères et sœurs, nous avons entendu « le loup habitera avec l’agneau ». ça laisse rêveur ! Cette promesse semble l’utopie absolue. Pourtant nous la portons en nous ! Quand j’allais à l’école primaire, j’ignorais qu’Isaïe avait promis cette réconciliation, mais je portais le désir de paix si bien que je ne comprenais pas que l’histoire de la France soit racontée seulement en citant les batailles (Alésia, Attila, Marignan, Verdun…) J’avais l’impression que les hommes sont exclusivement des êtres qui combattent leurs semblables, qu’ils sont des êtres qui marchent à la haine de leurs semblables comme les voitures marchent à l’essence.

            Sans doute, vous êtes comme moi, amoureux de la paix. Et même si Isaïe semble ne pas avoir les pieds sur terre quand il dit que l’enfant s’amusera sur le nid du cobra, même si vous savez que ce n’est pas demain que la fraternité va supprimer les violences, il ne vous semble pas stupide de désirer la paix. C’est pourquoi vous vous réjouissez quand on annonce que Jésus vient, lui le prince de la paix.

            En disant « Il vient », on dit que notre humanité ne le produit pas. Les hommes savent produire des bombes mais ne savent pas produire un prince de paix. Ils savent mettre en ordre de marche les tromperies, les racismes et les divisions, mais ils ne savent pas marcher vers l’unité selon la vérité et la fraternité. S’il existe un prince de la paix, il n’est pas produit par les hommes ; il est forcément donné aux hommes par Dieu. Et quand il est donné, il est reçu dans le monde comme un chien dans un jeu de quilles : on le fait taire et on le met en croix ; mais cela n’empêche qu’il vient, toujours, sans se lasser.

            L’opposition au Christ est si forte que l’on pourrait qualifier de rêveurs ceux qui disent qu’il vient. Pourtant, incontestablement, le Christ vient. Car les miséricordieux, les doux, les assoiffés de justice, les artisans de paix, les gens qui piétinent le conformisme, les gens qui osent ouvrir des passages nouveaux… ne sont pas là par hasard : c’est le Christ qui vient sous leurs traits.… Il ne vient pas comme le petit Jésus attendrissant, mais comme le Ressuscité victorieux de la haine… Tuer la haine, cela est impossible aux hommes, mais pas impossible à Dieu. Jésus a tué la haine en disant à ceux qui haïssent : « mon corps livré pour vous ». Et il poursuit son œuvre en donnant la force de son Esprit à ceux qui s’emploient à user les réflexes qui poussent l’homme à détruire ses frères.

            Alors, si Jean Baptiste est le prophète du prince de la paix, on s’attendrait à ce qu’il parle sur un ton bienveillant ; aussi, en l’entendant qualifier les gens de race de vipères, je me suis demandé comment un ton aussi agressif peut porter la Parole de Dieu. Si vous entendiez les prédicateurs vous qualifier ainsi, vous fuiriez. En fait, si Jean Baptiste a des mots qui heurtent, c’est peut-être parce que Dieu constate que s’il ne nous heurte pas, nous ne nous convertissons. Dieu tient à nous dire qu’il est urgent de se convertir et de porter du fruit.

            Un rabbin disait cette urgence de conversion de la manière suivante : « si demain, tu ne seras pas meilleur qu’aujourd’hui, à quoi te servira de connaître demain ? » Je continue sa phrase : Si demain, tu ne deviens pas fraternel et que tu chasses l’Esprit des frères, à quoi bon te réveiller ? Si demain tu ne deviens pas un collaborateur du Prince de la paix, un collaborateur miséricordieux et bon, à quoi bon revendiquer que tu es baptisé ? Si demain tu ne portes pas de bons fruits, à quoi bon manger aujourd’hui ? Donc, l’indicateur éminent qui montrera que le Christ est venu chez nous, cela sera toujours notre aptitude à dire sur nous-mêmes ‘mon corps livré pour les autres’. Dieu veut nous réveiller en nous disant « porte du fruit, sois réconciliateur, construis la paix, l’entente…

            « Le lion habite avec l’agneau ». Puissions-nous dompter le lion qui est en nous-mêmes… et suggérer aux autres de dompter le lion qui est en eux. Dans le désert de nos vies infructueuses, de nos rancunes improductives, de nos égoïsmes stériles, puissions-nous faites un chemin pour que passe celui qui nous rendra féconds.

1er dimanche de l’Avent
27 novembre 2022

            Vous comprenez aussi que, faisant référence à Noé à l’époque du déluge, l’Eglise nous presse de monter dans l’arche du nouveau Noé, le Christ, pour échapper au déferlement des catastrophes issues du péché. Si vous désirez vous éloigner de la calamité des injustices, de la catastrophe du dérèglement du climat, du drame de l’isolement, de la honte du racisme etc… montez vite dans l’arche du Nouveau Noé pour apprendre la relation fraternelle ! Dans l’arche du nouveau Noé, on n’apprend plus la guerre ; on veille à transformer les épées qui génèrent la mort en charrues qui génèrent la vie. Dans l’arche du nouveau Noé, on veille à rejeter les activités des ténèbres et on veille à se conduire en fils de lumière.

            Frères et sœurs, l’Eglise tient ce rôle bien utile. Mais, c’est qui, l’Eglise ? Pas seulement le Pape, pas seulement les gens qui ont sélectionné les lectures bibliques… L’Eglise qui nous presse de rester éveillés, ce sont les saints que nous côtoyons : ce voisin qui ne reste pas nonchalant pas quand il est question d’aider les autres nous invite à être nous-mêmes en éveil ; cette voisine dont le regard est fait de bienveillance nous invite à regarder les autres avec le même regard ; ce collègue qui est artisan de paix nous réveille quand nous nous laissons aller à des propos générateurs de division ; cette belle-sœur qui sait calmer les emportements nous invite à monter dans l’arche du Nouveau Noé… Chaque rencontre humaine où quelque chose peut nous rendre la dignité, c’est le temps où Dieu nous visite.

            En disant que des frères et des sœurs sont des veilleurs, qui attirent notre attention, j’exprime en fait comment le Seigneur vient dans nos vies. Inversement, je dis qu’en étant nous-mêmes veilleurs, en attirant l’attention des autres par un comportement de justice ou de bonté, nous collaborons à la venue du Seigneur chez eux. Le Seigneur vient ainsi par les hommes en qui il vit ; mais pour le voir, il faut être éveillé, il faut être exercé à voir les signes de sa présence dans les conversations et les comportements. Nous nous préparerions bien à Noël si chaque jour, nous écrivions un fait, ou une parole qui sont à nos yeux des signes que le Christ vient dans le monde.

            D’une manière ou d’une autre, nous chantons « venez, divin messie » ! Ce désir de rencontrer le Seigneur au long de nos années est essentiel ; ce désir de voir le jour où les relations humaines ne seront plus basées sur la violence mais sur l’amour est évidemment primordial. Mais il nous faut être éveillés pour entendre le Messie nous dire « venez vers moi ». Il nous le dit par ceux qui portent la paix, qui relativisent telle attitude malheureuse, qui atténuent des inquiétudes… Aux hommes qui disent : Venez, divin Messie…le Messie répond : Vous les hommes, réveillez-vous ; venez vers moi. 

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